Javier Swedzky : Mystère et boule de gomme

Il a d’abord fait des études en cinéma et en télévision en Argentine avant de séjourner en France pour apprendre l’art de la marionnette et l’enseignement du théâtre. C’est d’ailleurs à la suite d’un stage de manipulation qu’il a animé à Montréal que Javier Swedzky s’est vu proposer par André Laliberté de créer une oeuvre pour le Théâtre de l’OEil.

"Pour moi, la marionnette fait partie du théâtre comme un élément de plus du spectacle, affirme l’Argentin. Je ne fais pas de spectacles de marionnettes, mais des spectacles où il y a des marionnettes si elles sont nécessaires. Et comme je les aime, je m’arrange toujours pour qu’elles le soient." Conçues avec la complicité du scénographe Marc-André Coulombe, celles de Ah, la vache! ont des caractéristiques bien différentes les unes des autres. La belle et souriante milliardaire Henriette Toutamoi est si grande qu’elle n’entre pas en entier sur la scène. Petit, laid, désagréable et très mal élevé, Teddy Nounours est le méchant de service. Il se balade avec un immense lapin-robot. Quant aux détectives Bob et Tom, les formes humaines du spectacle, ils se déguisent en vache – qui elle-même se travestit en abeille ou en ballerine – pour enquêter sur la mystérieuse disparition d’un ours en peluche. Aussi doués soient-ils, ils se trouveront parfois dans une impasse, et le public devra chercher ses propres réponses.

"Quand j’étais petit, les spectacles étaient très manichéens, didactiques ou pédagogiques, se souvient Swedzky. Ils disaient ce qu’il fallait faire ou pas. En tant qu’adulte, je déteste qu’on me dise quoi penser et je sais qu’il y a des problèmes qu’on ne parvient pas à résoudre. C’est ce que j’ai voulu partager avec les enfants: poser des questions sans donner de réponse pour voir leur opinion." Pour créer un espace festif de réflexion et de partage, l’auteur-metteur en scène s’est inspiré des univers de la bande dessinée, de la comédie musicale, du vieux cirque et du cabaret.

"J’ai utilisé plusieurs choses que j’aime comme points de repère pour me guider", raconte celui qui a travaillé en étroite collaboration avec l’équipe de Théâtre de l’OEil, le compositeur-interprète Libert Subirana et les comédiens Éloi Archambaudoin, Joël Melançon, Christian Perrault et Catherine Vidal. "J’ai pensé à Alice au pays des merveilles où toutes les choses ont une innocence apparente, au théâtre de Brecht où les personnages parlent en chanson de ce qui leur arrive, où différents langages et points de vue sont proposés, et je me suis aussi référé au vieux cinéma russe où c’est au public de construire le sens."

Au-delà de l’enquête à mener avec Bob et Tom, les enfants sont donc conduits à réfléchir sur les questions de propriété et de gestion de conflits. Et comme plusieurs degrés de lecture sont possibles selon que l’on a cinq ans ou plus, chacun, y compris les adultes, peut trouver son plaisir dans cette pièce que l’on dit rythmée et déjantée. "Je me suis moi-même beaucoup amusé à l’écrire parce que j’ai inventé des personnages farfelus qui disent n’importe quoi", confie un metteur en scène totalement séduit par la société québécoise et contaminé par l’énergie créatrice de ses artistes.

À voir si vous aimez /
L’humour de Lewis Carroll, Les Clowns, de Federico Fellini, les big bands, le mambo, le funk