Jean-François Caron : Neige noire
Scène

Jean-François Caron : Neige noire

Le Théâtre Officiel del Farfadet présente Laine sans mouton, la nouvelle pièce de Jean-François Caron, dans une mise en scène de Martin Desgagné.

Depuis 1999, Martin Desgagné et le Théâtre Officiel del Farfadet travaillent à remettre en question les règles habituelles de création. C’est ce goût de l’exploration qui a conduit la compagnie vers Laine sans mouton, la toute nouvelle pièce de Jean-François Caron, celui à qui l’on doit notamment J’écrirai bientôt une pièce sur les nègres, Aux hommes de bonne volonté et Saganash.

Originaire de La Tuque, Caron rédige ses premières pièces vers l’âge de 12 ans, poussé par la tentation d’échapper au réel. "Si je m’assois pour écrire une pièce, j’essaye de trouver une manière de m’étonner, de m’inventer le théâtre, lance d’emblée Caron. Il est difficile, alors, de se reposer sur des méthodes éprouvées." Puis, au début des années 80, il déménage à Montréal pour étudier l’écriture dramatique à l’École nationale de théâtre: "J’ai maintenant une formation en théâtre, mais j’ai toujours gardé ce principe qui préside à l’écriture: faire comme si c’était la première fois que je rédigeais une pièce."

Un exemple saillant de la remise en cause des règles traditionnelles dans l’écriture de Caron? Laine sans mouton met en scène non pas un mais bien quatre personnages principaux. "D’habitude, la première règle dans un récit, c’est de choisir un personnage et de raconter son histoire. Ici, chacun d’entre eux a une valeur égale." La comédie se déroule en pleine journée d’élections, dans un État fictif dont la matière première est la laine et où il neige en plein mois de juillet! Le spectateur est témoin de quelques heures dans la vie de quatre protagonistes en perte de repères: la femme du Gouverneur (Chantal Baril), un adolescent en révolte qui vote pour la première fois (Alexandre Mérineau), une jeune travailleuse qui vient de perdre son emploi (Marie-Josée Forget) et une drag queen malencontreusement élue meilleure actrice de l’année (Jean Turcotte).

"Je voulais écrire une comédie et parler des citoyens, de cette impression de perte de contrôle qui se répercute sur tous les aspects de notre vie. Quand cette perte se produit, le citoyen cesse d’en être un. Il devient un jouet, notamment entre les mains des élus politiques." L’auteur fait ici allusion au système de santé québécois. "Certaines personnes qui ont vu de l’intérieur le système de santé nous disent qu’il faut être à l’article de la mort pour enfin arriver à se faire soigner. On a parfois l’impression d’être au tiers-monde. C’est là que je pense à une perte de contrôle."

Donc, un propos actuel et réaliste, mais où la caricature et l’absurdité des situations contribuent à créer, selon l’auteur, "une grosse farce politique". "Le metteur en scène n’a pas choisi le parti pris du réalisme, ce que je trouve très bien. Ça veut dire qu’il est dans la vraie ligne de l’écriture. Je pense qu’il pousse la farce, dans le jeu et dans tout le reste." En terminant, Caron suggère au public d’aller voir Laine sans mouton dans le même esprit que lui lorsqu’il prend sa plume, c’est-à-dire sans idées préconçues et dans le désir de s’amuser avec le réel.

Au Théâtre Prospero
Du 1er au 20 octobre
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