Marie Stuart : Souveraines passions
Scène

Marie Stuart : Souveraines passions

En communiquant à la Marie Stuart de Schiller cette dose de frénésie qui est devenue sa signature, Alexandre Marine réussit haut la main son entrée au Rideau Vert.

À la tête du Théâtre Deuxième Réalité depuis 1995, Alexandre Marine a généralement été cantonné aux petites et moyennes salles de la métropole. Avec la Marie Stuart que le metteur en scène d’origine russe propose ces jours-ci entre les murs du Rideau Vert, un spectacle décoiffant dans le meilleur sens du terme, le vent pourrait bien tourner.

Du point de vue de Marine, l’intérêt de la pièce de Schiller – écrite à l’aube du XIXe siècle à propos d’une série d’événements qui ont eu lieu au XVIe siècle – est bien loin d’être strictement historique. Et il n’a pas tort. L’écrivain romantique allemand porte les affrontements de Marie Stuart, reine d’Écosse, et Élisabeth Ire, reine d’Angleterre, au rang d’art. Cette lutte entre deux femmes imbues de pouvoir cristallise les instincts fondamentaux de la bête humaine. Par conséquent, le spectacle qui occupe actuellement la scène de l’un des théâtres les plus sages de la ville est transporté par les passions de deux femmes plus grandes que nature. Qu’il s’intéresse au destin d’Hamlet ou à celui de Salomé, Marine orchestre des spectacles survoltés, des ballets où les passions humaines s’expriment dans toute leur flamboyance. Heureusement, sa plus récente réalisation n’échappe pas à la règle. On est tenté de dire que le créateur a insufflé une âme russe à la tragédie. Le décor de Jean Bard accule littéralement les personnages au pied du mur. Qu’à cela ne tienne, les acteurs, comme inspirés par le rock du Projet M.U., n’hésitent pas à quitter la scène pour la salle. Dans les costumes étincelants de Jessica Poirier-Chang et les lumières contrastées de Spike Lyne, Sylvie Drapeau et Lise Roy sont le feu et la glace, la majesté et la déchéance.

Durant toute la représentation, victimes des passions des hommes aussi bien que des leurs, les deux femmes avancent droit vers le précipice. Lise Roy trouve sans nul doute l’un de ses plus beaux rôles en carrière. Vigoureuse, nuancée, toujours grandiose, portant des scènes entières sur ses épaules, la comédienne est la pierre précieuse de ce spectacle qui risque bien d’être l’un des moments forts de la saison.

Jusqu’au 20 octobre
Au Théâtre du Rideau Vert
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