Tendres totems et croquis cruels : En chantier
Scène

Tendres totems et croquis cruels : En chantier

Signée Benoît Vermeulen et Francis Monty, la pièce Tendres totems et croquis cruels donne la chance de découvrir les plus récents finissants du Conservatoire d’art dramatique de Montréal.

"Enveloppée de rires et de larmes / elle s’étend sur le divan comme une peinture pas finie". Ces vers, c’est Doum, le personnage incarné par Vincent Fafard, qui les déclame. Il lit, peut-être au hasard, des pages d’un recueil de Patrice Desbiens intitulé Dans l’après-midi cardiaque. Servie en tout début de spectacle, pendant que les spectateurs se placent et que certains acteurs ne sont pas encore en état de jeu, bien qu’ils soient sur la scène, cette citation pourrait à elle seule résumer la pièce.

D’abord parce que cette phrase, aussi simple que chargée de lucidité et de poésie, semble arrivée par hasard, comme plusieurs des bons moments du spectacle, non sertie par la mise en scène de Benoît Vermeulen ou appuyée par le jeu. Ensuite parce qu’elle évoque, par son sens original, une femme qui n’a peut-être pas atteint la maturité, et, par sa livraison sur cette scène, l’oeuvre en gestation qu’est Tendres totems et croquis cruels. Car il s’agit bien d’un laboratoire, où, autour d’un divan et d’un micro, une dizaine de jeunes acteurs talentueux tentent d’explorer, chacun à sa manière, le spectre de la matière. Or, le sujet est aussi simple que complexe puisqu’il s’agit de l’adolescence, avec ses crises, ses doutes, ses angoisses, ses rêves et sa fougue, un thème qui ne se laisse pas toucher de si près. Surtout lorsqu’on le prend de front. Alors, Francis Monty et les acteurs infiltrent comme ils le peuvent, avec la distance et le recul disponibles, les différents angles que le sujet présente. Par des jeux de séduction, des entrevues et des numéros, chacun tente de trouver et de prendre sa place.

Destinée aux adolescents, la pièce cerne assez bien ce moment charnière de la vie, comme elle respire la jeunesse et la passion. Seulement, la structure du spectacle, aussi vague que permissive, sert plus ou moins bien ces jeunes acteurs que l’on sent capables de beaucoup, mais peut-être pas prêts à investir, devant public, une oeuvre toujours en chantier. Tous apprennent sûrement beaucoup avec ce banc d’essai, mais le spectateur demeure perplexe devant ce curieux objet dont il ne connaît ni le mandat, ni la mission. La plus belle réussite du spectacle demeure l’occasion qu’il nous fournit de voir autant d’acteurs de la relève se donner ainsi.

Jusqu’au 3 novembre
À la Salle FRed-Barry
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