Roche, papier, couteau… : À couteaux tirés
Avec Roche, papier, couteau…, Marilyn Perreault nous ouvre les portes d’un univers sombre mais empreint d’une grande humanité.
En 2003, avec Les Apatrides, la première pièce de Marilyn Perreault, le Théâtre I.N.K. nous propulsait dans un road trip hors du commun. Question de défier son propre imaginaire, l’auteure et comédienne de 30 ans a voulu que les personnages de sa deuxième pièce, tout juste publiée chez Lansman Éditeur, évoluent dans un seul et même espace. Le résultat, Roche, papier, couteau…, est un bouleversant huis clos sur la souffrance humaine.
Un petit bled perdu et anonyme de l’Extrême-Nord. Cinq jeunes âgés de 12 à 17 ans arrivent clandestinement par cargo, après avoir été enfermés pendant un mois dans un conteneur. Le dur voyage a eu raison de Mute, le plus jeune d’entre eux. Les quatre survivants arrivent de Brusquie, un nom qui résume bien leur caractère. Également originaire de Brusquie, Mielke (Ève Gadouas), l’infirmière du village, est la seule à comprendre le langage des adolescents. Elle hérite donc de la lourde tâche d’intégrer ces jeunes au reste de la population. Nox (David-Alexandre Després) se sauve continuellement, Lonely (Catherine-Amélie Côté) respire de la colle, Iourded (Éloi Archambaudoin) se terre dans son silence et la jeune Ali (Annie Ranger) parle sans arrêt! Dans cette région froide et inhospitalière, où le spleen est chose courante, disons que le jeu des nouveaux arrivants (roche, papier, couteau…) soulage de façon bien singulière la souffrance des habitants. La pièce aborde la question du mal de vivre d’une manière troublante et déstabilisante. Bien que l’oeuvre s’apparente à une fable tragique et surréaliste, certaines questions d’actualité s’imposent à nous. Qu’est-ce qui pousse un individu à autant de violence? Ceux qui souffrent devraient-ils avoir le droit de mourir?
Malgré quelques longueurs, notamment imputables au fait que l’action soit concentrée dans un seul lieu (un vieux shack en bois), les mots inversés et les expressions imagées apportent de la vivacité à l’ensemble. Les comédiens savent donner à leurs personnages respectifs des personnalités bien définies. Conçue par Martin Marier, l’ambiance sonore, auréolée de mystère, illustre bien la tension suscitée par le lourd secret que portent les jeunes. La lumière feutrée de Martin Gagné et les jeux d’ombres du metteur en scène Marc Dumesnil se marient avec habileté à l’angoisse et à la poésie qui portent le texte.
Jusqu’au 24 novembre
À la salle Jean-Claude Germain
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