Carmen Ruest : Heure de pointe
Scène

Carmen Ruest : Heure de pointe

Saltimbanco, une production emblématique du Cirque du Soleil maintenant présentée dans une version "aréna", passe enfin par Montréal. Rencontre avec Carmen Ruest, directrice de création.

La première de Saltimbanco a eu lieu à Montréal le 23 avril 1992. Durant ses 14 ans de tournée sous chapiteau le spectacle a été présenté 4000 fois, dans 75 villes à travers le monde, devant 9,5 millions de spectateurs. Cette année, la production du Cirque du Soleil fait peau neuve avec une formule qui visitera une quarantaine de grands arénas, rejoignant des foules de 4000 à 5000 spectateurs chaque soir.

Quand Saltimbanco (l’expression signifie littéralement "sauter sur un banc") a été créé, les spécialistes prévoyaient un important exode rural. Selon Carmen Ruest, directrice de création de la version "aréna" du spectacle, le phénomène est toujours aussi présent 15 ans plus tard. "En 1992, on prédisait qu’en 2020, 50 % de la population mondiale allait vivre dans les villes. Le mois dernier, j’ai lu dans un magazine qu’en 2007, on est à 40 % de la population qui réside dans les centres urbains. On n’est pas très loin de la prédiction de l’époque." Saltimbanco s’ancre dans la frénésie de l’urbanité, transpose l’éclectisme de la ville, tout comme son réseau de paradoxes. "On se trouve dans une ville imaginaire, explique Ruest. Des gens quittent la campagne pour les grands centres. Ça commence donc avec la famille, l’enfant, la naissance et ça va vers une transformation. Ainsi, après la première partie, uniforme, naïve, on poursuit, avec des acrobates aux personnalités bien définies, dans l’univers décadent des cabarets."

On ne dresse donc pas un portrait sombre, affecté et malpropre de la ville. On met plutôt l’accent sur son penchant éclaté, vivant, bigarré. "On voulait parler d’urbanité, affirme celle qui travaille au Cirque du Soleil depuis ses débuts en 1984. L’objectif était d’assurer aux générations qui viennent de la joie et du bonheur dans les villes. Par conséquent, c’est un spectacle très coloré, amusant. C’est un bol de joie! On n’est pas allés dans les ruelles du tout, plutôt dans la joie de vivre, l’échange entre les gens, la communication."

L’ambiance baroque, cosmopolite de la ville est exprimée par la musique funky et groovy de René Dupéré, qui a remis sa trame sonore au goût du jour. Il en va de même pour la scénographie, les costumes et les maquillages, qui font la part belle aux trois nouvelles couleurs primaires des années 90, soit le magenta, le cyan et le jaune. Hautement acrobatique, le spectacle comporte trois principaux numéros de haute voltige faisant appel aux 26 acrobates de la troupe maison, soit les mâts chinois, la balançoire russe et les bungees, le premier numéro de la sorte à l’époque.

La reconfiguration de Saltimbanco a nécessité d’importants changements d’ordre technique, notamment quant à la hauteur de la scène, à la sonorisation et aux éclairages. Autrement, un seul numéro, celui du double fil de fer, a dû être écarté parce que l’accrochage en était trop compliqué. C’est un numéro de bicyclette artistique qui le remplace. "C’est un spectacle hors du temps, lance Carmen Ruest. Il n’a pas d’âge. Il a 15 ans, mais il pourrait être créé cette année. En fait, je suis un peu jalouse des gens qui vont le voir pour la première fois."

Du 19 au 30 décembre
Au Centre Bell