Kiss Bill : Bons sentiments
Scène

Kiss Bill : Bons sentiments

Avec Kiss Bill, une pièce manichéenne aux accents romantiques proches de la mièvrerie, Paula de Vasconcelos pose un premier pas mal assuré vers un nouveau cycle.

L’idée de départ est originale et audacieuse: introduire le thème de la compassion et du pardon pour dire la nécessité de changer si l’on veut préserver l’avenir de l’humanité et de la planète. Pour ce faire, Paula de Vasconcelos prend le contre-pied de la violence cinématographique de Tarantino. Reprenant la trame narrative du film Kill Bill et certaines des musiques qui l’habillent, elle transforme l’héroïne vengeresse du cinéaste états-unien en ange du pardon incarné par la danseuse Natalie Zoey Gauld.

Celle-ci apparaît d’abord en ombres chinoises derrière la porte coulissante d’inspiration japonaise qui divise la scène et cache, on le comprendra par la suite, le paradis terrestre des bons sentiments. Elle danse sur une musique sirupeuse contrastant avec l’action qui se développe à l’avant-scène où s’incarne le mal à travers Sylvie Moreau, productrice cynique et sans scrupules, Alexandre Goyette, cinéaste déprimé en quête de sens, et quatre acolytes danseurs sans âme ni identité propre. Au fil d’une alternance de scènes théâtrales et de séquences chorégraphiées, la danseuse transforme les gros durs en agneaux, séduit le cinéaste qui retrouve ainsi goût à la vie et ébranle la productrice qui finit par se soumettre en pleurant à sa bénédiction. Tel un conte de fées où le bien finit par triompher du mal, l’histoire est cousue de fil blanc. On ne s’explique pas ce choix qui ne rend hommage ni à l’intelligence du public ni à la subtilité de la metteure en scène attitrée de Pigeons International. Pourtant, il y a quelques heureuses tentatives: le mime hilarant d’un combat sanglant entre Moreau et Goyette, une parodie de ninjas…

En somme, on assiste à un enchaînement de séquences qui nous livrent par blocs et de manière trop littérale les données narratives de l’histoire. Les scènes ne s’interpénètrent pas plus que la danse et le théâtre ne fusionnent et les chorégraphies dissolvent les individus dans le groupe. Ainsi, quand une végétation luxuriante apparaît en fond de scène et que les sourires béats s’impriment sur les visages des protagonistes libérés d’on ne sait quelle prison mentale, on a beau voir l’orchestration de la transformation du monde, on n’y croit pas une seule seconde. Dommage.