Blanc : En perte de repères
Avec Blanc, Geneviève L. Blais propose une rencontre toute spéciale avec des femmes qui ont perdu leurs mères.
Après avoir rayonné sur la scène parisienne, la pièce Blanc – un texte que la Française Emmanuelle Marie a écrit à Montréal en 2004 – prend son envol dans la Métropole. La dramaturge, décédée en mai dernier, y aborde la perte de la mère. La metteure en scène et fondatrice du Théâtre à corps perdu, Geneviève L. Blais, dirige Simone Chevalot et Isabelle Roy dans ce spectacle qui oscille entre monologues et dialogues, poésie et quotidien.
Deux soeurs se retrouvent pour accompagner dans la mort celle qui leur a donné la vie. Dans la cuisine, tout près de la chambre dans laquelle est alitée leur mère, elles vaquent à des occupations quotidiennes. La foi religieuse qu’elles n’ont pas et la médecine parfois stérile ne peuvent apaiser leur sentiment de vide et d’impuissance. Cette brisure dans le temps ouvre la porte à plusieurs questionnements sur l’absence de leur père ou sur le silence de leur mère, en plus de les pousser à réfléchir sur leur vie professionnelle et amoureuse. Blais propose une lecture de l’oeuvre qui embrasse l’écriture, explore à la fois la quotidienneté et l’existentiel, l’intime et l’universel. Elle fonde son travail sur la présence de 12 femmes – dénichées par l’entremise d’une petite annonce – qui ont réellement perdu leurs mères. Le spectacle débute avec leurs courts témoignages, ancrés dans la chair et dans les souvenirs. Puis, elles prennent place derrière le public disposé en forme de U autour de la scène. À quelques reprises, éclairées par des rayons lumineux, les femmes réagissent aux propos de la pièce à l’aide de chants, de respirations ou de murmures.
La promiscuité avec ces inconnues, dont la multitude rappelle le choeur grec, confère une belle humanité à l’ensemble de la représentation. On a l’impression, l’espace de quelques minutes, de partager avec elles une grande intimité. Le décor – des dizaines de bocaux en verre – exprime bien cette idée de transparence et de fragilité. Sur scène, par contre, le jeu des comédiennes demeure souvent rigide et privé d’émotions. Bien sûr, cette froideur illustre la perte de repères et la détresse des deux soeurs, mais cette rationalité dans la douleur tarde à nous ébranler.
Jusqu’au 26 janvier
À la Salle Fred-Barry
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