Les Mondes possibles : Conte des mille et une vies
Scène

Les Mondes possibles : Conte des mille et une vies

Arianna Bardesono et son équipe nous entraînent avec bien peu de conviction dans Les Mondes possibles de John Mighton.

Créée à Toronto en 1990, portée au grand écran par Robert Lepage en 2000, la pièce de John Mighton, dramaturge mais aussi mathématicien et philosophe, emprunte plusieurs avenues. Malheureusement, dans la mise en scène d’Arianna Bardesono, jeune diplômée de l’École nationale, l’oeuvre prend surtout des airs de rigolade.

Pour son premier engagement professionnel en sol québécois, Bardesono ne s’est pas facilité la tâche. Multiple, kaléidoscopique, insaisissable, profondément mystérieux… voilà qui décrit bien le texte traduit par Maryse Warda. Un vrai défi de mise en scène. Un défi qui, il faut bien le dire, n’est pas relevé par cette production du Quat’Sous. Sans occulter totalement la gravité du récit, la représentation mise largement sur le potentiel comique des personnages. Bien entendu, la drôlerie des protagonistes est indéniable. Mais leur détresse, leur errance, presque tragique, paraît bien plus riche encore. Pourquoi ne pas l’exploiter? Des interstices du thriller, là où circulent philosophie, science et romance, un amour infini et énigmatique, la jeune créatrice se contente le plus souvent d’extraire de quoi susciter quelques éclats de rire.

Au coeur de l’intrigue, il y a Georges (Steve Laplante), un homme ordinaire retrouvé dans son appartement, le crâne vidé de son cerveau. Ensuite, il y a les deux policiers chargés d’élucider le crime (Denis Bernard et Patrice Coquereau), un tandem plutôt grand-guignolesque. Et, pour compléter le tableau, un savant fou (Paul Ahmarani), le suspect idéal. Cela dit, le vrai héros de cette histoire, c’est le cerveau de Georges, un cortex où s’agitent les souvenirs les plus divers, ceux de toutes les vies parallèles que l’homme a menées à la conquête d’une seule et même femme portant différents noms (Catherine-Amélie Côté).

Avec une telle matière première, la représentation ne devrait-elle pas s’ouvrir sur tous ces mondes possibles, sur toutes ces réalités où, au même moment, nous commettons les plus grandes erreurs et posons les gestes les plus nobles? Exposés à une étrangeté qui pourrait être la nôtre (la pièce s’appuie sur de véritables théories concernant l’existence d’une multitude de mondes possibles), on voudrait être inquiets, séduits, fascinés. Mais les éclairages sont inadéquats, le jeu est inconsistant ou alors caricatural et le décor est inefficace. De quoi refroidir bien des spectateurs avides de sensations nouvelles.

Jusqu’au 2 février
Au Théâtre Prospero
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