Stéphane Brulotte : La quête
Scène

Stéphane Brulotte : La quête

Le comédien Stéphane Brulotte est sur le point d’assister à la création de son premier texte de théâtre, Le Fou de Dieu.

Il y a déjà quatorze ans que Stéphane Brulotte exerce, avec rigueur et assiduité, son métier d’acteur. Pour se mettre en danger, dire en ses propres mots ce qu’il a dans la tête et le coeur, l’homme s’est engagé il y a quelques années dans une vertigineuse expérience, l’écriture de sa première pièce: Le Fou de Dieu.

"Je ne sais pas si c’est un déclencheur inconscient, mais j’ai commencé à écrire à la suite de la naissance de ma fille. J’avais le goût de faire quelque chose de créatif. Bien sûr, jouer, c’est créatif, mais écrire, c’est le summum. Tu décides de tout. C’est magnifique. C’est un exercice que j’ai adoré." Puis, d’autres, et non les moindres, se sont mis à y croire. Dominic Champagne a souhaité produire la pièce dans le giron de sa compagnie, le Théâtre il va sans dire, Marc Béland a accepté de signer la mise en scène, et Benoît McGinnis a voulu endosser le rôle principal. "Je me considère extrêmement chanceux, lance Brulotte. C’est un privilège. C’est au-delà de toutes mes espérances." Aujourd’hui, Jacques Baril, Julie Castonguay et Lise Roy sont aussi de l’aventure.

Le fou de Dieu en question, c’est François Bernardin, un adolescent perturbé, hanté par François d’Assise au point où il s’imagine en être la réincarnation. Sous nos yeux, son rêve, son utopie, sa soif de justice… tout cela bascule vers le cauchemar, sombre dans la folie. Dans sa chute, le jeune homme entraînera irrémédiablement ses proches. Mais qu’est-ce qui, à notre époque, peut bien décider un homme dans la trentaine à écrire une pièce sur la schizophrénie et la foi? "C’est sûrement d’avoir connu des schizophrènes de très près, avoue Brulotte. Cela dit, ce n’est pas une pièce à thèse ou une pièce sociale. J’ai essayé de faire une oeuvre d’art qui parlait d’une question que moi, je me posais face à l’existence de Dieu. En somme, j’ai voulu aborder la grande question, mais à ma manière, en incorporant des éléments de ma vie."

LA LIBERTE D’ETRE FOU

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la pièce aborde la santé mentale et la foi dans un même souffle, comme les deux faces d’une même médaille. "François d’Assise entendait des voix, lance Brulotte. Dépendamment de notre vision du monde, cela en fait soit un saint, soit un schizophrène. C’est là où mon questionnement se situe. Sommes-nous aujourd’hui en train d’enfermer certains mystiques? Le mysticisme est peut-être devenu une maladie qu’on soigne avec des neuroleptiques."

Ainsi, entre la schizophrénie et son reflet, le mysticisme, l’auteur refuse de prendre parti. "J’ai essayé d’être à la frontière, vraiment sur la fine ligne entre les deux. J’ai beaucoup travaillé pour trouver cet équilibre. Je ne voulais pas me prononcer, pas pencher d’un bord ou de l’autre, pour que ce soit troublant. Au théâtre, ce sont les questions qui sont belles. Si la pièce est un plaidoyer pour quoi que ce soit, c’est pour la liberté."

Cette liberté, c’est celle de ne pas penser comme la majorité, celle de ne pas endosser les dogmes du capitaliste, celle de dire tout haut ce que plusieurs n’osent même pas penser tout bas. Tout ça est au coeur de l’oeuvre. Bien entendu, cela comporte une grande part de risque, entraîne des conséquences graves que le personnage principal de la pièce devra subir. "On a dit que la folie était une réaction saine à un environnement malsain. C’est précisément ce sur quoi la pièce est échafaudée. Ce dont il est question, c’est de la liberté d’être fou. François d’Assise revendiquait sa folie. Je pense que la plupart des fous sont très conscients de ne pas être comme les autres. C’est ce qui rend leur position si difficile. Ils sont pour ainsi dire écartelés, victimes d’une grande souffrance."

Du 22 janvier au 16 février
À la Cinquième salle de la PdA
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BELAND ET MCGINNIS

Quand est venue l’heure de trouver un metteur en scène, Champagne et Brulotte ont tout de suite pensé à Marc Béland. "On a pensé à Marc à cause de la parenté qu’il y a entre plusieurs des rôles qu’il a joués et celui de François. On s’est dit qu’il allait savoir comment jouer ça." En effet, après avoir exploré l’oeuvre de Claude Gauvreau au TNM, côtoyé les Impatients (ceux et celles qui fréquentent la Fondation pour l’art thérapeutique et l’art brut du Québec) et incarné Renaud dans la télésérie Annie et ses hommes, l’homme commence à en connaître un rayon sur la maladie mentale. Quant à Benoît McGinnis, il est impliqué dans le projet depuis le tout début. "C’est un acteur incroyable, pense Brulotte. Entre lui et le personnage, il y a une vraie rencontre!"