Vincent Bolduc et Réal Bossé : À vos marques!
Chaque année, la LNI propose une série de rencontres musclées entre six équipes déterminées à remporter la prestigieuse Coupe Charade. On en parle avec Vincent Bolduc et Réal Bossé.
C’est à l’automne 1977 qu’ont eu lieu les premiers matchs de la Ligue nationale d’improvisation (LNI), une formule développée, faut-il le rappeler, par Robert Gravel et Yvon Leduc. Trente ans plus tard, l’improvisation est appréciée à travers le monde. Mais, selon Réal Bossé et Vincent Bolduc, la discipline est particulièrement vivante au Québec.
"L’impro rejoint beaucoup les Québécois, déclare Bossé, qui entame une 12e saison au sein de la LNI. On aime jouer et se conter des histoires. On est des pousseux de jokes! Notre culture est très différente de celles qui nous entourent et on a le goût de dire qui on est. Ça ne me surprend pas que ça dure depuis trente ans. En plus, il y a un bassin d’artistes et de créateurs assez impressionnant au Québec." Bolduc, qui débute une 8e saison avec la LNI, abonde dans le même sens: "L’impro a conquis le monde, mais ce n’est pas pour rien que ça a été inventé ici."
Après toutes ces années à fouler la patinoire, la motivation première des deux compagnons de jeu demeure la même: générer des moments de grâce aussi jouissifs pour les joueurs que pour le public. "Avec le temps, la nervosité a changé de forme, explique Bossé. On sait que ce n’est pas si grave de se péter la gueule. Par contre, le stress de réussir un bon match est toujours présent. On veut marquer l’imaginaire collectif des gens." Justement, quels sont donc les ingrédients pour qu’une impro soit dite réussie? Bolduc se lance: "C’est quand les deux joueurs s’écoutent assez pour respecter l’histoire, tout en se surprenant l’un l’autre. C’est aussi quand tu sais que tu peux déstabiliser ton adversaire en sachant qu’il retombera sur ses pattes. Un gars qui roule en bicycle, c’est plate. Si tu lui mets des bâtons dans les roues, ça devient intéressant!" Bossé précise qu’il ne s’agit pas ici de compétition, mais bien d’une stratégie d’émulation. "On pousse l’autre dans ses derniers retranchements pour lui permettre d’aller plus loin et on espère qu’il fasse pareil pour nous!"
Les deux virtuoses s’entendent pour qualifier leur art de "sport théâtral". "Il faut que tu sortes de là en suant, soutient Bossé. Il y a de la gravité et du sacré dans le sport comme dans l’improvisation. Dans toute impro, tu dois respecter des étapes: observation, proposition, conflit et évolution du conflit. Si tu triches, c’est comme un sacrilège envers les règles." Bossé convient tout de même que certaines "étapes" ont évolué au cours des trente dernières années. "En 2008, les joueurs perdent moins de temps à s’apprivoiser et entrent au coeur de l’action dès le début du match. En ce sens, le rythme s’est accéléré."
Au-delà de l’exercice physique et intellectuel qu’elle procure, l’improvisation a joué un grand rôle dans la vie de ces deux passionnés du jeu. Bolduc: "Grâce à l’impro, j’ai eu envie d’écrire et de développer mes idées et mes histoires pendant plus de cinq minutes! C’est pourquoi je suis entré à l’École nationale en écriture dramatique." Bossé: "J’aime auditionner pour des rôles parce que je perçois le thème donné par le réalisateur comme une impro. Ça a enlevé beaucoup de craintes chez moi."