Bacchanale : Quête de pureté
Scène

Bacchanale : Quête de pureté

Avec Bacchanale, un texte d’Olivier Kemeid, Frédéric Dubois fait une curieuse mais étonnante entrée sur la scène théâtrale montréalaise.

À l’annonce de ce projet, il y avait de nombreuses raisons de se réjouir. Peu de temps après une heureuse relecture de L’Énéide, Olivier Kemeid proposait un croisement entre le mythe sulfureux des bacchantes et les récriminations chorales des serveuses de Michel Tremblay. Et pour porter cette oeuvre à la scène, on avait choisi nul autre que Frédéric Dubois, enfant chéri du milieu théâtral de la Vieille Capitale. Sur papier, Bacchanale était un véritable rendez-vous.

Bien qu’elle risque de susciter de vives discussions, principalement esthétiques, la représentation n’exerce pas l’envoûtement qu’elle devrait. Et ce, malgré la conviction parfois frénétique des comédiennes. Kemeid et Dubois livrent une création entièrement féminine, une charge féministe, un théâtre qui sacrifie l’anecdote sur l’autel de la poésie, une cérémonie où six femmes laissent momentanément tomber leurs chaînes. Le texte est une charge. Cela ne fait pas de doute. Une charge des femmes envers les hommes, bien entendu, mais aussi envers la société souillée dans laquelle nous vivons tous. Mettant le Théâtre d’Aujourd’hui sens dessus dessous – au propre comme au figuré puisque les gradins sont disposés sur les quatre côtés de la scène -, la représentation est la chronique d’un soulèvement annoncé. Les six serveuses de tous âges composent quelque chose qui s’apparente à un microcosme, un choeur de solitudes. Fourbues, désabusées, éteintes par le jeu stérile de la séduction, elles n’aspirent plus qu’au repos, à la liberté, à la pureté originelle.

De l’abrutissement à la révolte, du bégaiement à la poésie, il y a tout un parcours. Un parcours que Violette Chauveau, Johanne Haberlin, Marie-Claude Giroux, Michelle Rossignol, Isabelle Roy et Isabelle Vincent empruntent sous nos yeux en accéléré. Au départ, elles n’ont pas les mots qu’il faut pour nommer leur détresse. Puis, sans qu’on ne sache trop pourquoi, jaillit d’elles un flot d’images et de métaphores, une poésie qui évoque des siècles d’asservissement. Malheureusement, la libération ne vient pas. Les six femmes abdiquent, laissant le spectateur avec la désagréable impression d’avoir, comme elles, perdu la bataille. La prochaine fois, peut-être.

Jusqu’au 15 mars
Au Théâtre d’Aujourd’hui
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