C.H.S. : Incandescence
Scène

C.H.S. : Incandescence

C.H.S. (Combustion humaine spontanée), entre poésie et étrangeté, transporte le spectateur au plus profond de l’âme: celle du personnage, et la sienne.

C’est un objet d’un éclat sombre, d’une beauté terrible que propose le Théâtre Péril avec C.H.S., texte écrit et mis en scène par Christian Lapointe, créé en collaboration avec le collectif Cinaps.

Dans un décor aux lignes épurées, un homme (Christian Lapointe) est assis dans un fauteuil; près de lui, un écran de télévision, un bidon d’essence. Derrière, tout en haut, une fenêtre, d’où le regarde une femme (Maryse Lapierre); à sa gauche, un écran translucide derrière lequel se tient un scientifique (Sylvio-Manuel Arriola), qui livrera commentaires et théories sur la combustion humaine spontanée, illustrés à mesure sur l’écran.

C.H.S. donne à voir un homme projetant de s’immoler par le feu. À mille lieues cependant de l’anecdote, la pièce explore, à partir de l’idée de la combustion, la solitude, l’âme et la condition humaine, suivant les fils multiples de l’imagerie que fait courir le feu. Spectacle à la structure éclatée, C.H.S. se nourrit du soliloque de l’homme. Pas de déplacement, chaque personnage demeurant dans son espace, aucun réalisme, si ce n’est l’acuité des perceptions, dans cette pièce aux allures de tableau vivant, qu’illuminent projections, éclairages surprenants, qu’accompagne musique répétitive, obsédante.

L’interprétation de Christian Lapointe, d’une rigueur et d’une précision remarquables, fait de ce texte magnifique une mélopée hypnotique. Scandés, prononcés avec lenteur, les mots qu’égrène son personnage halluciné transmettent sa fascination pour le feu et son désir de brûler (physique, existentiel), comme un rêve grisant. Même investissement chez Maryse Lapierre et Sylvio-Manuel Arriola, dans un jeu à la fois détaché et poétique.

La pièce évoque toute combustion: brûlure, amour, passion vitale, tout ce qui dévore. La grande beauté du texte tient à la variété et à la force de ses métaphores: des allumettes à la chambre à gaz, de Prométhée au phénix, mythes et références s’y bousculent, s’y lient en une imagerie puissante. C.H.S. ne divertit pas, et ne prétend pas le faire. Mais donne à entendre un texte au pouvoir d’évocation puissant, une langue aux rythmes envoûtants qui permet de s’approcher de l’indicible et, un bref instant, de plonger dans le mystère de l’âme humaine. Pour peu qu’on se glisse dans l’univers singulier qu’il propose, ce spectacle exigeant devient un voyage d’une intensité vertigineuse, dont on revient secoué.

Jusqu’au 19 avril
Au Théâtre Périscope
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À voir si vous aimez /
La rigueur d’un théâtre sans concession; les textes au mystère envoûtant.