Jean Marc Dalpé : La lumière au bout du tunnel
Avec Slague, une production du Théâtre du Nouvel-Ontario, Jean Marc Dalpé nous entraîne dans l’obscurité d’une mine.
Qu’est-ce que la slague? "Ce sont les résidus de la roche que l’on extrait pendant les opérations minières, explique Jean Marc Dalpé. Ça ressemble un peu à de la lave. Quand ils la sortent de la mine, ça teinte le ciel d’une couleur rougeâtre. À Sudbury, tout le monde sait ce que c’est, ça fait partie du paysage." Cette ambiance ouvrière fait aussi partie de la pièce écrite par le Canadien Mansel Robinson. "Cet auteur me touche beaucoup, affirme Dalpé. Avec Slague, l’histoire d’un mineur, mais également avec Trains fantômes, il a créé des personnages peu représentés sur la scène canadienne, des hommes issus de la classe ouvrière du Nord de l’Ontario."
Pour dévoiler les aléas de cette réalité, Dalpé, qui a aussi traduit la pièce, est seul en scène. Sous la direction de Geneviève Pineault, il interprète le personnage de Pierre DeLorimier, un mineur ravagé par la culpabilité et un fort sentiment d’injustice à la suite d’un accident au fond de la mine. L’homme est resté coincé sept jours dans le noir. Il a perdu l’usage de ses jambes. Mais le pire dans cette histoire, c’est la mort de son fils.
Bien qu’elle soit monologique, la pièce est construite sur une intrigue. S’agissait-il d’un accident? Le père endeuillé doit-il espérer justice ou vengeance? "Le personnage vient nous livrer un secret et ça donne une ligne émotionnelle à la pièce, explique Dalpé. Au fur et à mesure que l’intrigue se dévoile, on vit sa transformation. Au départ, on sent la grande colère. On est dans le noir, au fond de la mine. À la fin, on voit la lumière au bout du tunnel."
Non seulement Dalpé a-t-il la délicate tâche de tisser une intrigue en solo, mais son personnage est en fauteuil roulant. Sur une scène standard comme celle du Théâtre du Nouvel-Ontario où la pièce a été créée, ça va. Mais sur la scène exiguë de La Petite Licorne, ça complique les choses. La mise en scène a dû être retravaillée, mais l’essentiel demeure les mots. "La pièce est un hommage à la parole, affirme Dalpé, à l’importance de pouvoir raconter. Comme le dit le personnage: "Y a plein d’affaires dans vie, c’est juste autour d’une table de cuisine que tu te mets à les comprendre.""
Du 15 au 30 avril
À La Petite Licorne
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PRISES DE PAROLE
Né à Ottawa en 1957, Jean Marc Dalpé est comédien, poète, romancier, dramaturge, traducteur et scénariste. Son théâtre – mentionnons Août, Trick or treat, Le Chien, Lucky lady et Eddy – est publié aux Éditions Prise de parole. Ces jours-ci, l’éditeur de Sudbury publie, sous le titre Roc & rail, Trains fantômes et Slague, les deux pièces de l’Anglo-Canadien Mansel Robinson que Dalpé a traduites. L’an dernier, toujours chez Prise de parole, on publiait Jean Marc Dalpé. Ouvrier d’un dire, les actes d’un colloque tenu en 2004 à l’Université de Guelph. Sous la direction de Stéphanie Nutting et François Paré, 13 spécialistes et collègues abordent la langue délinquante de Dalpé, le tragique et les rapports de force dans son oeuvre, en plus de retracer les étapes déterminantes de son parcours. (C. Saint-Pierre)