L'Imprésario de Smyrne : Trio infernal
Scène

L’Imprésario de Smyrne : Trio infernal

Avec L’Imprésario de Smyrne de Carlo Goldoni, le Théâtre du Nouveau Monde (TNM) clôt sa saison sur une note agréablement festive.

Un vent chaud et goldonien souffle sur la Métropole. Avant que la troupe du Piccolo Teatro de Milan ne débarque en ville pour nous offrir son Arlecchino servitore di due padroni, le TNM dévoile ces jours-ci L’Imprésario de Smyrne. Traduite par Marco Micone et orchestrée par Carl Béchard, la pièce met en vedette 12 interprètes dont Emmanuel Bilodeau, Sophie Cadieux, Pierre Chagnon, Sébastien Dodge, Sylvie Drapeau, Robert Lalonde, Pascale Montpetit et Alain Zouvi.

Installés à Venise pour tenter de dénicher un contrat lucratif, trois prétendues cantatrices et autres pseudo-artistes en quête de reconnaissance apprennent par l’intermédiaire d’un agent arriviste qu’un riche commerçant turc de passage en Italie désire monter une troupe pour la création d’un opéra à Smyrne. Dans l’espoir de décrocher le premier rôle et d’hériter d’un gros magot, ces rigolos narcissiques et sans le sou mettront tout en oeuvre pour charmer ledit imprésario et faire valoir leurs attributs respectifs…

Des personnages attachants et névrosés qui s’autoparodient et qui se leurrent quant à la noblesse de leurs motivations purement triviales… Voilà le portrait tout craché des joyeux lurons de L’Imprésario de Smyrne, une pièce écrite en 1789 et dans laquelle Goldoni dépeint avec un humour implacable la faune vaniteuse et la compétition qui colorent le milieu théâtral de son époque pas si lointaine… Pour faire écho à ces drôles de bêtes en constante représentation, Carl Béchard a ingénieusement intégré à sa mise en scène l’idée du "théâtre dans le théâtre", imaginant notamment la présence d’un souffleur qui dicte aux acteurs leurs répliques. Un procédé efficace qui met en relief toute cette mascarade composée de personnages faussement modestes qui sont prêts aux pires bassesses pour renflouer leur bourse et manger à leur faim. Béchard a également concocté des transitions originales qui s’apparentent à des intermèdes chorégraphiés et chantés où la mezzo-soprano Catherine B. Lavoie pousse des airs italiens. Le maître d’oeuvre a évidemment dirigé les interprètes avec le grain de folie qu’on lui connaît. Résultat? Des personnages vifs qui carburent à l’exubérance. Dans la peau de Carluccio, un "sopraniste" à la fois arrogant et insécure, Emmanuel Bilodeau se démarque tout autant que la délicieuse Pascale Montpetit qui incarne la "cantatrice" Tognina. Armés de perruques aux brushings plus grands que nature et vêtus des costumes inventifs de Marc Senécal, les comédiens sautent à pieds joints dans ce carnaval vénitien au cours duquel le public devient complice de ce savoureux délire collectif.

Jusqu’au 10 mai
Au Théâtre du Nouveau Monde
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