Seagull-Play : L'acting et son double
Scène

Seagull-Play : L’acting et son double

Enrique Diaz, acteur et metteur en scène d’origine brésilienne, conçoit Seagull-Play comme une étude de La Mouette de Tchekhov. Entre la représentation et son exploration.

En janvier dernier, nous avons eu l’occasion de voir La Mouette selon Frédéric Dubois. Voici maintenant que la Companhia dos Atores sera de passage au Carrefour pour nous présenter Seagull-Play, son adaptation très libre du classique de Tchekhov. Curieusement, Enrique Diaz et sa bande ont eux aussi choisi de mettre en lumière l’envers du décor, en nous conviant pour leur part à une répétition où s’entrelacent la pièce et le travail des artistes en train de la monter. Comme si la meilleure façon d’aborder cet auteur était de proposer, plutôt qu’une vision unique, une exploration de possibles. "Tchekhov travaille sur la simplicité, mais il est très complexe, explique le metteur en scène. Si tu crois l’avoir saisi, tu te trompes. Cette matière est tellement vivante que ce n’est jamais fini."

Ainsi ont-ils imaginé une formule leur permettant d’y aller de leur propre réflexion sur le théâtre, tout en jetant un éclairage nuancé sur des personnages qui, eux-mêmes, partagent ces préoccupations. "Les acteurs et les concepteurs ont travaillé en collaboration. L’idée était d’établir un champ de création. Nous avons fait plusieurs ateliers, avons beaucoup échangé sur les possibilités du texte, eu une grosse discussion sur l’art, sur le temps, sur nous-mêmes, et commencé à improviser, raconte-t-il en soulignant l’importance du caractère collectif de l’exercice. Nous jouons la pièce et nous parlons de la pièce, de cette période, en les mettant en relation avec nos vies, notre époque; nous y intégrons nos propres expériences et émotions. Je dirais qu’il s’agit d’un spectacle quantique, en ce sens que les acteurs, les personnages et le style changent constamment; il y a multiplication des points de vue."

En tant que comédien, Enrique Diaz confesse un penchant pour tout ce qui a trait à l’interprétation. "Un des aspects fondamentaux de la pièce réside dans ce jeu entre les acteurs qui construisent et déconstruisent des réalités. Ce qui fait que les personnages flottent en quelque sorte à l’intérieur de ce champ; ils restent dans l’air, changeant, dansant, et nous en saisissons des fragments. Mais ça n’a rien d’un vidéoclip. Nous racontons l’histoire; seulement, en même temps, nous parlons de ce que c’est que d’acter, observe-t-il. Aussi, l’espace, la poétique des objets dans l’espace s’avèrent incontournables. Il s’agit d’un mélange organique de ces deux langages et le corps du spectacle s’ajuste au caractère des personnages."

Enfin, il remarque: "Ce qui compte, pour nous, c’est de demeurer très honnêtes. Nous ne cherchons pas à avoir le dernier mot sur Tchekhov ou sur le théâtre contemporain. Seagull-Play est le résultat de notre expérience; il s’agit simplement de parler de nous, de la vie, de notre profession et de ce que nous avons appris au sujet de l’auteur en travaillant sur le texte. Nous n’avons pas approché ce classique comme un classique, mais comme quelque chose que nous voulions ouvrir et où nous voulions faire de la place pour le questionnement. Je crois que c’est très vivant, car nous y injectons de l’air pour penser, respirer et renouveler le regard." De quoi inspirer, non?

Du 22 au 25 mai
À la salle Multi du Complexe Méduse
Dans le cadre du Carrefour international de théâtre
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