2e Festival TransAmériques : Pièces de choix
Scène

2e Festival TransAmériques : Pièces de choix

En danse comme en théâtre, le 2e Festival TransAmériques a permis d’heureuses découvertes et de réjouissantes retrouvailles. Bref retour critique.

Entre le 22 mai et le 5 juin, le 2e Festival TransAmériques (FTA) a permis de découvrir le travail de 8 créateurs étrangers et de renouer avec celui de 14 artistes, pour la plupart québécois. Selon le FTA, plus de 24 000 spectateurs étaient au rendez-vous, ce qui correspond à un taux d’assistance de 80 %. Plus de la moitié des 95 représentations affichaient complet.

DECOUVERTES

Avec mady-baby.edu, Gianina Carbunariu pose un regard tonique sur une situation consternante. En s’appuyant sur quelques praticables et des projections vidéo pour le moins éloquentes, trois jeunes Roumains racontent leur douloureuse transplantation dans le rêve de l’Occident. Ici, pas d’apitoiement, pas de mélodrame, seulement la réalité, franchement énoncée, sans complaisance ni provocation.

Avec Seagull-Play, Enrique Diaz a superbement dépoussiéré Tchekhov. Sous nos yeux, une troupe répète La Mouette, cherche des réponses, évoque des paysages, traduit avec une imagination débordante et une liberté admirable les états d’âme de Nina, Treplev et les autres. Ce spectacle prouve que la "comédie" en quatre actes de Tchekhov est un formidable terrain de jeu, un territoire qui est bien loin d’avoir livré toute sa substance.

Avec La Marea, Mariano Pensotti a pris possession de la rue Émery. Derrière quelques vitrines, sur un balcon, assis à une terrasse, foulant les trottoirs, jonchant le sol, des acteurs, recrutés à Montréal, offrent des instants de vie. D’une station à l’autre, en observant les êtres et en lisant les mots qui défilent au-dessus d’eux, on goûte à la dispute, à la souffrance, au regret ou à la monotonie, mais surtout à une terrible solitude.

DE RETOUR

Avec Melt, une performance chorégraphique présentée dans un escalier de l’Esplanade de la Place des Arts, Noémie Lafrance offrait 15 minutes de ravissement visuel. Épinglées à un mur de pierre, vêtues de quelques lambeaux de tissu, recouvertes d’un mélange de cire d’abeille et de lanoline synthétique, cinq femmes ont, plusieurs fois par jour, donné naissance à un magnifique tableau vivant.

Is You Me est une expérience hautement originale. La rencontre de Louise Lecavalier et Benoît Lachambre était prédestinée. Le solo I Is Memory avait grandement impressionné, cette nouvelle collaboration sidère. Méditation sur l’identité, elle doit beaucoup au travail en direct du plasticien Laurent Goldring et du compositeur-interprète Hahn Rowe. La symbiose de leurs efforts n’est ni plus ni moins qu’un voyage, une heure hors de nous, hors de nos vies, hors de la banalité du quotidien. Vivement que ce spectacle reprenne l’affiche.

Marie Brassard profitait de ce deuxième FTA pour créer L’Invisible, une oeuvre pour le moins troublante. Avec le Finlandais Mikko Hynninen et le Québécois Alexander MacSween, elle donne un spectacle spectral, étonnamment expérimental, beaucoup plus abstrait que d’ordinaire. Le solo devrait être de retour à l’Usine C la saison prochaine dans une version plus achevée.

La plus récente création de Marie Chouinard, Orphée et Eurydice, revisite le mythe avec une audace remarquable. Les danseurs, habités d’une énergie surhumaine, donnent corps à la légende. Aux quatre coins de l’immense plateau, le yin et le yang, l’amour et la guerre s’entrechoquent magnifiquement. Certains diront que le spectacle est encore un peu vert. Ils n’ont peut-être pas tort. Chose certaine, il ne faudra pas le rater quand il sera bien mûr.