Coup de ciseaux : Une histoire dont vous êtes le héros
Scène

Coup de ciseaux : Une histoire dont vous êtes le héros

Avec la comédie policière Coup de ciseaux, Le Patriote de Sainte-Agathe renonce à une longue tradition de vaudeville. Un retentissant nouveau départ.

À Washington, Chicago et Boston, la pièce de Paul Portner Shear Madness, version comique d’un drame psychologique et policier, tient l’affiche depuis près de trente ans. La recette fonctionne: une histoire de meurtre dans un salon de coiffure fréquenté par des personnages archétypaux, qui devient le théâtre d’une enquête policière dans les règles du genre. L’intérêt, ici, c’est que, comme dans une partie de Clue, les enquêteurs s’en remettent au public pour aiguiser les soupçons et interroger les suspects.

Dès lors, les frontières du quatrième mur éclatent, et pour une fois, à cause du contexte convivial du théâtre d’été, ça fonctionne à merveille. Vous l’aurez compris, le meurtrier n’est pas le même tous les soirs, ce qui demande aux acteurs une grande capacité d’adaptation et surtout, malgré le respect d’un canevas précis, une certaine disposition à l’improvisation. François-Étienne Paré y excelle particulièrement. C’est aussi en partie grâce à son sens de la répartie qu’il parvient, comme le font plus discrètement ses acolytes Éric Hoziel et Anne Casabonne, à communier avec la salle. Encouragés par l’enquêteur (rassurant Claude Maher), les spectateurs n’hésitent pas une seconde à participer au spectacle, jusqu’à se permettre quelques familiarités et indisciplines (du moins le soir de mon passage). Étrangement, le chaos ainsi créé n’est pas désagréable. Une expérience de spectateur plutôt singulière.

Louise Deschâtelets jongle moins bien avec l’imprévu que ses comparses. Dans le rôle caricatural d’une parfaite Outremontaise, elle est bien inconstante. Son accent pincé soudain disparaît pour revenir plus tard, son jeu physique, tantôt grotesque, tantôt très quotidien, ne nous permet pas d’y croire. Il faut dire que devant le très magnétique Paré, au sommet de sa forme dans ce rôle de coiffeur hystérique, l’interprétation des autres acteurs paraît un peu fade. Il donne à ce personnage, qui n’est au fond rien de plus qu’une accumulation de clichés homosexuels faciles, une irrésistible authenticité. Il faut y aller, pour l’interaction d’abord, et pour l’énergie vraiment contagieuse de la troupe.