Cirque Éloize : Une pluie d’étoiles
Le Cirque Éloize et ses joyeux troubadours reviennent au Centre culturel de l’Université de Sherbrooke avec Rain, un spectacle poétique qui surfe entre le rire et les pleurs.
Le Cirque Éloize fête cette année ses 15 ans. Pour l’occasion, la compagnie ramène au Québec sa production à succès Rain – Comme une pluie dans tes yeux, après une longue tournée qui l’a menée aux quatre coins du monde. L’année 2008 est aussi l’occasion pour les "éloizes" de présenter Nebbia, le troisième volet de la Trilogie du ciel signée par l’auteur et metteur en scène Daniele Finzi Pasca et amorcée avec Nomade et Rain. Oui, puisque comme une chaude pluie d’été qui vous prend par surprise, à l’origine de ce beau success story, il y a eu un coup de foudre artistique…
LA NOSTALGIE SYMPATHIQUE
Fondée en 1993 par trois collègues, le Cirque Éloize regroupait à ses débuts sept artistes circassiens des Îles-de-la-Madeleine – le mot éloize signifie "éclair de chaleur" dans leur patois madelinot. À mi-parcours, après avoir créé trois spectacles de son cru, la troupe fait la rencontre de Daniele Finzi Pasca, un homme de théâtre italo-suisse. "Sa sensibilité, sa poésie, son travail fin sur le clown, la manière qu’il a de faire habiter la scène nous a immédiatement séduits, relate Jeannot Painchaud, fondateur et directeur artistique du Cirque Éloize. Nous nous étions déjà définis comme une compagnie qui travaillait sur la présence naturelle des artistes, par la multidisciplinarité, le fait de travailler en clan… Et Daniele avait cette sensibilité toute italienne d’aller chercher ces moments de tendresse, ce sens de l’image poétique et les qualités profondément humaines des artistes."
Nostalgie serait assurément le mot clé de cette Trilogie du ciel et du travail de ce créateur subtil et sensible. Une nostalgie douce qui se placerait sur la ligne médiane entre la joie et les pleurs; cet état encore douillet où on ne bascule ni dans l’un, ni dans l’autre. "C’est une nostalgie sympathique qui nous fait pleurer de bonheur. Ça c’est Daniele. C’est présent dans tout son travail. On est entre le rire et les larmes et on aime bien être là, on the edge", renchérit Jeannot Painchaud.
Rain se déroule dans un théâtre où des répétitions d’un spectacle de cirque sont en cours et où la réalité et la fiction se confondent. Les artistes-comédiens se hèlent, se congratulent par leur prénom, ce qui demande une pudeur particulière aux interprètes, tout en créant un rapport d’intimité avec le public. "Ça nous ramène à nos propres souvenirs, à notre propre mémoire. Il y a quelque chose qui est presque de l’ordre du sacré."
TRILOGIE CELESTE
Hier encore, les arts du cirque peinaient à se faire reconnaître comme une forme d’art à part entière, mais voilà, les choses ont évolué et le Cirque Éloize a été la première compagnie de cirque au Québec à sortir des chapiteaux pour investir les salles de spectacle. D’abord aux États-Unis, puis ailleurs dans le monde, étant même reçu dans les prestigieux Tchekhov Festival de Moscou et le Festival d’Édimbourg notamment. Une nouvelle reconnaissance du milieu, certes, mais il y a encore des luttes à gagner, comme le fait remarquer Jeannot Painchaud: "Le Conseil des arts et des lettres du Québec reconnaît le cirque comme une forme d’art depuis 2001, le Conseil des arts de la Ville de Montréal l’a fait cette année, mais le Conseil des arts du Canada ne le reconnaît toujours pas", se désole-t-il. Le directeur artistique se réjouit cependant d’un gain important: le spectacle Nebbia, coproduit par la compagnie suisse de Pasca, Teatro Sunil, ouvrira la saison 2008-2009 du Théâtre du Nouveau Monde à Montréal. Ce sera le premier arrêt québécois pour ce spectacle – créé à Genève en 2007 – qui visitera ensuite une douzaine de villes au Québec. "Nomade était assez festif, Rain est dans le souvenir, a beaucoup d’humour, de poésie… Nebbia est une suite logique; il est encore plus théâtral, l’humour est présent de A à Z. On est en terrain connu avec la signature de Daniele Finzi Pasca, mais il y a un travail d’acteurs encore plus poussé", relate Jeannot Painchaud. "Alors que dans Rain, on avait l’invention de la roue Cyr, un appareil qu’on voit maintenant dans tous les cirques, on aura aussi une invention de Daniel Cyr dans Nebbia", révèle-t-il.
Les 8, 9, 15, 16, 22 et 23 août à 20h30
Au Centre culturel de l’Université de Sherbrooke
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L’ANGE DÉPLUMÉ
Anna Ward fait partie des 13 artistes au sein de la tournée Rain. Elle a joint la troupe en 2007 pour remplacer Krin, qui avait été des débuts du spectacle. Spécialisée en trapèze ballant, Anna Ward a tourné pendant sept ans avec son solo, mais rêvait depuis peu de faire partie d’un spectacle, comme personnage présent du début à la fin. Ce à quoi l’esprit du Cirque Éloize – qui met tous les talents de ses interprètes à profit: acrobatie, chant, musique, comédie – a répondu. "Curieusement, dans Rain, je ne fais pas ma spécialité. Les deux numéros de trapèze étaient déjà pris. J’apprends donc à faire plein de nouvelles choses: quelques techniques de roue Cyr, du tissu, des pointes en danse, du swinging, de la jonglerie."
Celle qui cumule environ 75 représentations de Rain aux États-Unis – dans le réseau Broadway! -, et en France décrit son personnage comme "une femme forte, autoritaire, dont la fragilité et les faiblesses se révèlent pendant le spectacle".
Autre fait particulier, son personnage – qui récite le magnifique "texte de l’ange" – nécessitait qu’elle se rase le crâne. "Ça m’a fait plaisir de le faire, je découvre beaucoup de choses en moi. Être le crâne rasé sur une scène devant un public rend très vulnérable. T’as pas besoin de le jouer, c’est très vrai."
"La beauté du spectacle, c’est que les images avec lesquelles on travaille pour être toujours investi dans notre rôle peuvent changer. On peut se baser beaucoup sur comment on se sent dans le présent pour être juste, pour garder l’émotion fraîche. Il faut se provoquer. Enfin, il y a beaucoup de chemin pour mener à la fin", complète-t-elle.