Fred Pellerin : Sa sorcière bien-aimée
Tout le mois d’août, Fred Pellerin rode L’Arracheuse de temps à la salle des Bizouneries Caxton, à Saint-Élie. Entretien.
Dans Comme une odeur de muscles, Fred Pellerin avait hissé de l’ombre Ésimésac Gélinas, l’homme fort du village de Saint-Élie-de-Caxton. Pour sa quatrième et nouvelle production, il s’intéresse cette fois à la marraine de cet hercule: la sorcière du village, ou L’Arracheuse de temps.
"Elle a toujours été là dans les autres shows, mais en low profile", signale le conteur. "C’était une femme qui ressemblait un peu – d’après ce que j’en entends, parce que je ne l’ai pas connue – à Darling Lady dans Les Belles Histoires des Pays-d’en-Haut, la riche héritière qui venait du Colorado. Cette femme-là vivait toute seule à Saint-Élie sur un immense domaine, un club de chasse et pêche qu’elle avait acheté des Américains. À l’époque, une femme riche, pas de mari, décolletée, les cheveux lousses, c’était une sorcière. D’ailleurs, il y a un gars qui vient de sortir un livre sur l’histoire du village et, elle, il l’appelle la sauvagesse. La sauvagesse n’était pas cernable: elle était impliquée dans le village et, en même temps, elle tenait tête à l’Église, elle n’allait pas à la messe. Aussi, elle était crainte parce qu’elle était "sorciérisée". Il y a de quoi de ben, ben flou autour d’elle, ce qui fait qu’il y a plein de rumeurs et de légendes." Des histoires qu’il raconte avec l’humour et la folie qu’on lui connaît. "En fait, ce que le spectacle est devenu, c’est chacun des personnages dans sa relation avec elle. Parce que le curé voulait que personne n’aille la voir, évidemment. Donc personne n’y allait de façon officielle, mais tout le monde y allait par en dessous! Tout le monde a fait appel à elle, parce que dans les pouvoirs qu’on lui accordait, elle pouvait, par exemple, aider les gens dans la misère. Finalement, ce n’était pas une sorcière, mais elle trouvait le tour, juste en transformant le regard sur la vie, de changer les affaires."
FAIRE LE GRAND SAUT… CHEZ SOI
Fred Pellerin lève le voile sur L’Arracheuse de temps dans son propre village. C’est donc devant les descendants et amis de ses personnages qu’il teste pour la première fois son matériel. Cela l’inquiète-t-il un peu? "Jouer à Saint-Élie-de-Caxton ou peu importe où, quand il y a des gens de Saint-Élie-de-Caxton, pour moi, c’est ben, ben stressant parce qu’il y a une charge émotive plus grande. Je sais qu’ils ont des réactions qui ne vont pas avec la foule, qu’ils voient les affaires d’une façon différente parce qu’ils ont connu tel personnage ou qu’ils réentendent une histoire qu’ils m’ont racontée. Mais, il faut que je te dise, bon, on appelle ça un rodage parce qu’il reste des affaires à ajuster, mais le show, je l’ai fait en cachette quand même 15 fois! Je me suis "pré-rodé"."
SONDER LES PROFONDEURS
Fidèle à son habitude, le conteur se passe encore de mise en scène. Il se donne tout l’espace nécessaire pour improviser à sa guise. "Je ne veux pas m’emprisonner dans le fait que telle lampe s’allume à tel mot! Je ne veux jamais que le show soit fixé. Je veux toujours continuer à le "chirer"." Ce désir d’exploration s’étend par ailleurs au geste créatif. "Avec le show, je pense que je vais toucher à des nouvelles affaires. J’avais peur de finir par faire du Fred Pellerin. C’est mon quatrième show quand même, et à la longue, je me fais des roulières…. En tout cas, j’avais peur de me faire des roulières, de venir à me parodier moi-même. Mais j’ai trouvé une autre piste, une autre affaire où je n’étais pas allé encore. Le thème principal du show, c’est – les gens vont continuer à rire et à se taper sur les cuisses, ça ne changera pas – sur… la mort. La mort, ça peut être bien deep. Et je vais dans quelque chose de bien deep à un moment donné…" Nous promet-il un peu de lumière au bout du tunnel? "Ben, oui! La finale, c’est dans les dents! En fait, c’est la mort et l’absence de mort. C’est de passer par la mort pour swinguer la vie! Il faudrait que tu vois le spectacle parce que, dit de même, je trouve que ça fait cliché. Sauf que je ne l’explique pas dans le show, je le montre avec des mises en situation et des personnages. Ça fait que ça nous arrive dans la gueule d’une autre façon."
Jusqu’au 30 août
À la salle des Bizouneries Caxton
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