Les Clowns noirs : Méchant théâtre
Scène

Les Clowns noirs : Méchant théâtre

Ça y est, les Clowns noirs ont trouvé leur recette. Avec eux, la méchanceté n’aura jamais eu aussi bon goût.

Ils arrivent à être sombres et brillants à la fois. Ils sont imparables, incomparables, insupportables… Mais ils sont de bons comédiens. Pour Barabbas dans la Passion, les personnages d’inspiration biblique créés par Martin Giguère semblent avoir été faits sur mesure pour les Clowns noirs. Trac (Patrice Leblanc) est un Pilate brute et autoritaire, Piédestal (Pascal Rioux) est un Zaché abusé et désabusé, Grossomodo (Pierre Tremblay) incarne avec brio son Jésus niais et lunatique, et Diogène (Martin Giguère) réussit à la fois à camper le plus vil des Lazare et la femme quasi sublime de Pilate, la très voyante Claudia…

Cette fois, les Clowns en viennent enfin à faire du théâtre, reléguant au passé la menace de la brigade anti-culture. Mais la révolte sourd toujours, plus subtile, du texte, du geste, des tripes… C’est d’ailleurs des entrailles d’un Lazare particulièrement méchant, violent et volubile que naîtra le premier Clown noir de la lignée, Barabbas de son petit nom, incarné par Christian Ouellet.

Se joindre à la confrérie des célèbres Clowns n’a certainement pas dû être facile pour Ouellet. Alors que les autres comédiens expérimentent depuis plusieurs années leur personnage, il devait relever le défi de donner sa chair à un rôle tout frais… Si sa crédibilité dans la peau d’un Clown noir n’a pas rejoint le même sommet que celui qu’ont atteint les autres membres de la troupe, il s’impose comme un nouvel élastique à la fronde du Faux Coffre en incarnant un être qui justement ne se connaît pas et ne connaît rien de la vie. Déjà Clown noir à sa naissance, malicieux et primitif, il découvre peu à peu ce qu’implique son instinct pour le jeu.

Un Clown noir est né. Ne reste qu’à espérer que la mort de son personnage ne l’empêche pas de revenir se joindre à la bande de sombres comédiens.

Sans renier le côté burlesque des premières productions, la transition vers un théâtre sans clowns semble s’opérer sans anicroche – pour l’instant. Les sombres icônes demeurent toutefois le rempart idéal contre les défauts de scène – nez décollé, perruque volante et autres rigolos accidents de parcours – qui seraient reprochés à une production dite "normale". Ils sont le gage d’un succès devenu presque instantané – l’affluence à la salle Murdock ne le dément pas – et leur mort prématurée pourrait nuire à la compagnie…

En attendant, ils sont plus méchants que jamais, et jouissent de leurs élans de méchanceté jusqu’à faire crouler de rire une salle qui n’en peut plus de se taper sur les cuisses. Et pourtant, la force de cette nouvelle production du Faux Coffre, c’est justement de savoir doser l’humour et la tragédie…

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