Qu’est-ce qui reste de Marie-Stella? : Rose bonbon
Écrit et mis en scène par Simon Boulerice, Qu’est-ce qui reste de Marie-Stella? transforme La Petite Licorne en cour d’école où retentissent des chansonnettes pop.
La préadolescence, ce monde à cheval sur l’enfance et l’âge adulte, est au coeur de la nouvelle pièce de Simon Boulerice. Marie-Stella, Marie-Clown et Joseph n’ont presque rien perdu de leur naïveté d’enfants, mais les voilà empêtrés dans des histoires de sexe oral et de grossesse fictive.
Marie-Stella (Édith Arvisais), avec ses cheveux crêpés et son imagination fertile, est amoureuse de Joseph (Gabriel Lessard), un garçon gêné qui, tel un Hippolyte contemporain, préfère de loin son ballon de basket. Marie-Clown (Sophie Desmarais), rivale de Marie-Stella, se déhanche en mini-jupe et se vante d’"avoir goûté le sperme de Joseph". Un triangle amoureux et des jeux de séduction qui vont prendre des proportions gigantesques, jusqu’à se transformer en véritable tragédie où les coeurs saignent et la fatalité frappe.
La force du texte réside justement dans cette puissante montée dramatique qui fait évoluer une situation en apparence légère vers la plus improbable démesure. Et ce, sans jamais quitter le monde de l’enfance et l’imaginaire de Marie-Stella, façonné d’entrevues fictives avec un documentariste, de références à l’iconographie religieuse (une sympathique récurrence dans l’écriture de Boulerice) et de chansons pop à l’émotion contenue. Cela dit, il y a bien quelques moments creux, essentiellement dus à l’inconsistance de Joseph, à sa passivité dans les toutes premières scènes. La pièce, d’une durée totale de près de deux heures, s’étiole parfois dans des dialogues répétitifs, surtout entre Marie-Clown et Marie-Stella, dont les conflits par moments superficiels ralentissent le cours de l’action (alors que toute l’essence de leur rivalité est déjà exposée avec force dans leurs rapports avec Joseph).
La mise en scène de Boulerice est sobre, afin de laisser toute la place aux acteurs. Quelques jeux de ballon s’insèrent ici et là, avec justesse et modération. Des dessins à la craie sur les murs créent le décor au fur et à mesure. Complices et investis, les trois comédiens sont parfaits. Arvisais montre l’étendue de son registre, Desmarais, ses airs de petite peste et Lessard, sa fougue et sa précision. La musique de Chad Vincent-Malo, du piano mélodramatique aux rythmes disco, est en osmose totale avec les chansons pop imaginées par l’auteur.