Reynald Robinson : L’heure de vérité
Le Théâtre Passé Minuit présente Il était onze heures le soir, une pièce qui explore la complexité des relations humaines. Entretien avec l’auteur et metteur en scène Reynald Robinson.
Écrite par Reynald Robinson, la pièce Il était onze heures le soir a été jouée pour la première fois en avril 2008, dans une mise en scène de l’auteur, par un groupe de finissants du Conservatoire d’art dramatique de Montréal. Pour présenter le spectacle sur une scène professionnelle, les neuf comédiens et comédiennes fraîchement diplômés – Mathilde Addy-Laird, Yannick Chapdelaine, Robin-Joël Cool, Romy Daniel, Myriam Fournier, Catherine LeGresley, Guillaume Regaudie, Isabelle Sasseville et Guillaume Tremblay – ont fondé le Théâtre Passé Minuit.
Depuis longtemps, l’humanisme fascine Robinson. "D’après moi, si on se fie à notre nature humaine, nous sommes de terribles prédateurs, lance d’entrée de jeu le créateur. Je me suis souvent demandé pourquoi on s’accroche si fort à des valeurs humanistes alors que, dans certaines situations, elles foutent le camp assez rapidement." Cette réflexion a poussé l’auteur de La Salle des loisirs (Théâtre d’Aujourd’hui, 1997) à s’aventurer dans l’écriture d’une pièce qui, selon lui, est demeurée à l’état de chantier. L’année dernière, lorsque le directeur du Conservatoire a proposé à l’auteur d’écrire un texte pour les finissants et finissantes, Robinson a décidé de récupérer quelques fragments de scènes de ladite pièce en construction. "J’avais écrit plein de scènes que j’aimais, mais que j’avais, disons, coupées au montage parce que je n’arrivais pas à les placer dans la pièce initiale. Pour les étudiants du Conservatoire, j’ai rassemblé ces bouts de scènes et j’en ai fait une nouvelle histoire."
Le spectacle met donc en scène deux soeurs dans la vingtaine qui reçoivent des amis dans un chalet familial situé sur le bord du fleuve. Pendant le souper, elles ont prévu annoncer une bonne nouvelle aux invités. Mais l’événement ne se déroule pas comme prévu… "Ce qui est important dans cette pièce, soutient Robinson, c’est de remarquer comment les êtres humains fuient leur vraie nature, se faufilent et se sauvent. Les personnages sont perdus, égarés. Certains spectateurs m’ont dit que j’avais fait un portrait cru et cruel des humains. C’est vrai et c’est ce que j’aime au théâtre: qu’il nous gifle."
Pour inviter le public à se remuer les méninges, l’auteur et metteur en scène a opté pour une suite de scènes non chronologiques. "Cette construction décousue permet aux spectateurs de travailler davantage pour atteindre et pénétrer les personnages", précise-t-il. Côté mise en scène, Robinson avance qu’il a parié sur la vérité du discours. "J’ai cherché le côté ordinaire du drame. Les petites souffrances et les petites joies du quotidien, voilà ce qui m’émeut. Pour moi, la réalité dépasse la fiction. Écrire cette pièce m’a fait comprendre que l’on n’a pas besoin d’être rationnel ou logique dans notre façon de raconter."