Carnets de voyages : Partir, revenir
Les Deux Mondes dévoilent ces jours-ci leur nouvelle création, Carnets de voyages, une expédition pour le moins erratique autour de la planète.
Il y a déjà 35 ans que l’équipe des Deux Mondes, autrefois La Marmaille, parcourt le monde avec ses créations. Parmi les 26 spectacles de la compagnie – plus de 3 300 représentations sur les 5 continents -, il faut mentionner Terre promise, L’histoire de l’oie, Leitmotiv et Mémoire vive, probablement les plus populaires et les plus récompensés.
Depuis quelques années, le travail du metteur en scène Daniel Meilleur, du compositeur Michel Robidoux et du vidéaste Yves Dubé s’oriente significativement vers l’intégration des nouvelles technologies, un parti pris pour l’image qui s’accompagne bien souvent, il faut le dire, d’importantes lacunes dramaturgiques. Ce pourrait être une volonté, le désir de donner purement et simplement dans le théâtre d’images. Mais, pour le moment, les propositions visuelles ne sont pas assez substantielles pour constituer le coeur de la représentation. C’était déjà vrai avec 2191 nuits, créé en 2005, et c’est encore plus vrai avec Carnets de voyages, le texte de Normand Canac-Marquis créé ces jours-ci.
Pourtant, l’idée de départ était belle: rendre hommage au théâtre et au voyage, à ces rencontres exceptionnelles que les arts vivants permettent entre des acteurs et un public, aux quatre coins du monde. Pour célébrer les 35 ans d’une compagnie qui ne cesse de rayonner, au moment même où le gouvernement coupe les ailes aux créateurs du pays, on ne pouvait imaginer mieux. Malheureusement, le résultat, une mosaïque de souvenirs plus ou moins ordonnés, est bien loin de convaincre.
Dans la peau de deux acteurs en train de construire un spectacle à partir de leurs carnets de voyages, Jean-François Casabonne et Véronique Marchand, au demeurant fort justes, ne semblent pas connaître plus que nous le sens de leur entreprise. La représentation cherche en vain à relier la vie personnelle des deux personnages à certaines des pages les plus noires de la récente histoire de l’humanité: attentats, génocides, massacres… Si la musique est percutante, enveloppante, la dramaturgie est clairement défaillante, et, surtout, les images 3D sont souvent risibles. Jusqu’à la toute fin, on attend que se dégage un lien entre tous ces éléments. Malheureusement, on quitte la salle sans avoir trouvé ce fil tant espéré.