Gérard Poirier : Face à face
Scène

Gérard Poirier : Face à face

Chez Duceppe, on entame la saison avec Halpern et Johnson, une pièce du Britannique Lionel Goldstein. Le comédien Gérard Poirier nous parle de cette oeuvre qui explore les replis complexes du mariage, de l’amour et de l’amitié.

Né à Londres en 1935 d’un père et d’une mère d’origine juive, Lionel Goldstein écrit son premier roman – The Executioner – au début des années 60. C’est en 1983 qu’il accouche de la pièce Halpern et Johnson. L’oeuvre, d’abord présentée dans une version cinématographique mettant en vedette Laurence Olivier et Jackie Gleason, est créée pour la scène à Tel Aviv, en 1995. Dans une traduction de Michel Dumont et sous la houlette de Monique Duceppe, Gérard Poirier et François Tassé incarnent cet automne le tandem au coeur de l’oeuvre.

Voilà près de 54 ans que Gérard Poirier, armé de son envoûtante voix de ténor, exerce le métier de comédien. Toutes ces années à fouler les planches n’ont toutefois pas altéré l’amour que voue l’illustre interprète à son travail. C’est d’ailleurs au nom de cette passion inébranlable pour le théâtre qu’il a accepté, à 78 ans, d’interpréter le personnage de Johnson. "C’est un défi assez considérable à relever pour deux acteurs qui n’ont plus 20 ans! confie le comédien. Il y a beaucoup de mots à échanger. Au début, j’ai eu peur et j’ai hésité. Mais je suis content d’avoir accepté. Ça me prouve que je peux encore étudier des textes très longs. Il faut être passionné pour faire ce métier. Si je n’avais plus le feu sacré, j’abandonnerais."

Halpern et Johnson, c’est l’histoire de deux septuagénaires aux personnalités opposées qui, sans le savoir, partagent l’amour d’une femme nommée Florence. Lorsque celle-ci rend l’âme, une rencontre improbable se produit entre les deux hommes. Poirier explique: "On apprend peu à peu que tout au long de son mariage avec Halpern, Florence a développé une très grande amitié avec Johnson, son premier grand amour. Elle est allée chercher en lui ce qui lui manquait: le côté culturel, les arts. Mais jusqu’à la mort de sa femme, Halpern ignorait tout de cette relation."

La pièce met donc en scène une discussion entre deux vieillards qui, dans le New York des années 80, font le bilan de leurs vies respectives – et si différentes – auprès de cette même femme. "Voilà pourquoi, même si on ne la voit jamais, Florence est pour moi le personnage principal de cette pièce", soutient Poirier. Selon le comédien, Monique Duceppe a axé sa direction d’acteur sur la différence de caractère entre Halpern et Johnson. "Comme Halpern est un colérique qui s’emporte facilement, il fallait que Johnson, mon personnage, soit plus sage. Cette pièce est en quelque sorte une étude de caractères."

Un duo de personnages prometteur, donc, qui marque la première vraie rencontre artistique entre deux grandes pointures du théâtre québécois. "C’est la première fois que François et moi nous donnons la réplique! lance Poirier, visiblement heureux de ce tardif tête-à-tête. On se connaît très peu et il a fallu créer une complicité. Mais aujourd’hui, nous avons un plaisir immense à croiser le fer."