Michelle Rouleau : Les sens de la vie
Scène

Michelle Rouleau : Les sens de la vie

Quatre jours à découvrir ou redécouvrir des paroles théâtrales d’ici, voilà ce que propose le 8e Festival de théâtre à L’Assomption (FAIT). Au menu: créations, reprises, laboratoires, lectures publiques et soirées de contes. On en discute avec la directrice artistique, Michelle Rouleau.

Sur ses quatre scènes, le FAIT accueille cette année des compagnies dont la démarche s’articule d’abord et avant tout autour de la parole, de la nécessité de dire le monde avec des mots puissants et des récits poignants. Et comme si c’était prémédité, la plupart des spectacles abordent les mêmes thèmes, en une sorte de dialogue croisé qui rend la programmation très cohérente. La directrice artistique, Michelle Rouleau, explique s’être "aperçue, en assemblant les morceaux, que la plupart des spectacles parlent de la mort, amorcent une réflexion sur le sens de la vie". Thème indémodable et inépuisable s’il en est un.

Ça commence en force avec la reprise de Je voudrais me déposer la tête, adaptation théâtrale du premier roman de Jonathan Harnois. Personne n’a oublié cette poignante mise en scène de Claude Poissant (Théâtre PàP) qui avait ravi la critique et les spectateurs de l’Espace Go l’an dernier, ni la poésie crue et les métaphores chargées du jeune auteur. Une histoire de suicide, d’amitié et de reconstruction de soi sur fond de banlieue bétonnée "qui risque d’avoir un effet réellement cathartique sur les spectateurs de L’Assomption, croit Rouleau, parce qu’elle parle d’une réalité de banlieue qui les concerne directement".

La 8e édition du FAIT poursuit des échanges entamés avec certains artistes au cours des années précédentes. Le Théâtre I.N.K., par exemple, vient présenter une première étape de création de son nouveau projet, Vides passagers, qui explore le thème des passages et du caractère éphémère de la vie. Le Théâtre les gens d’en bas, de Rimouski, est aussi de retour avec une nouvelle création, Pierre-Luc à Isaac, à Jos, une comédie dramatique de Cédric Landry qui traite de passation, d’exode et de la relation père-fils. Une énième présence aussi pour le Groupe de poésie moderne, compagnie montréalaise évoluant depuis plusieurs années en marge des institutions, et à qui le FAIT accorde sa pleine confiance "à cause de son univers très particulier, inclassable, qui a eu un succès fou lors des éditions antérieures du FAIT", précise la directrice artistique. Son nouveau spectacle, De l’impossible retour de Léontine en brassière, se situe dans l’univers automatiste du peintre Paul-Émile Borduas.

Il ne faut pas manquer non plus le Théâtre extrême de Jean-Guy Legault (Théâtre du Vaisseau d’Or). Ce spectacle interactif, une fausse course au leadership qui circule depuis plus de deux ans sur les scènes du Québec, remet en question, avec ludisme et intelligence, les coulisses et les codes de la politique. La compagnie Toxique Trottoir expose aussi sa vision de la Belle Province dans Le Musée des vieux animaux québécois, installation-spectacle d’abord présentée à l’occasion du Festival Fringe et des festivités du 400e de Québec. La pièce interroge les traditions et la culture québécoises ainsi que leur rapport à l’immigration. Ce sera aussi l’occasion de renouer avec les mots de la conteuse Renée Robitaille, figure de proue du conte québécois, qui nous entraîne cette fois dans l’univers des mines abitibiennes avec son nouveau spectacle Hommes de pioche.

Au rayon "découvertes", le Festival a programmé quelques lectures publiques de textes inédits qui s’annoncent prometteurs. Un exemple? Passage (titre de travail), de Catherine Dajczman, propose un voyage dans la mémoire et l’inconscient, "un rendez-vous avec le profane et le sacré, de la mort à la vie", lit-on dans le programme. L’auteure, qui est avant tout comédienne et percussionniste, s’intéresse depuis plusieurs années à la question du sacré au théâtre, mais elle se lance dans l’écriture pour la toute première fois.

Afin de prolonger le plaisir et la réflexion, le communicateur Winston McQuade anime des rencontres avec les artistes après les spectacles. Érudit, passionné d’art, l’homme a réalisé des centaines d’entrevues avec des créateurs de tout acabit au cours de sa longue carrière radio-canadienne. Il promet de passionnantes discussions. Notons aussi le passage de Philippe Avron, célèbre homme de théâtre français qui s’amène pour une conférence conviviale autour du thème de la création. C’est d’ailleurs dans les plans du FAIT de programmer plus d’artistes internationaux, "si les coupures du gouvernement Harper ne nous mettent pas trop de bâtons dans les roues", souligne discrètement Michelle Rouleau.

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