Top Dogs : Le déclin de l’empire américain
Scène

Top Dogs : Le déclin de l’empire américain

Avec Top Dogs, leur troisième production, les créateurs du Théâtre de la Marée Haute confirment leur talent, un talent qu’aucun manque de moyens n’a pu empêcher d’éclore.

Il y a eu Kvetch, du Britannique Steven Berkoff, un texte percutant, revisité avec clairvoyance, puis Rhapsodie-Béton, du Français Georges Michel, un petit bijou méconnu, offert avec une conviction étonnante. Et maintenant Top Dogs, du Suisse Urs Widmer, une partition montée aux quatre coins de la planète mais jamais chez nous, livrée ces jours-ci avec un sens de l’humour (sombre) peu commun.

En moins de deux ans, le metteur en scène Michel-Maxime Legault et ses collègues du Théâtre de la Marée Haute ont réussi à démontrer la pertinence de leur démarche. De manière drôle et grinçante, toujours originale, et surtout sans une ombre de cynisme, leurs réalisations se penchent sur le moteur, faut-il le rappeler défectueux, de la société occidentale.

Cette fois, il y a sur scène des hommes et des femmes d’affaires de haut vol, des top dogs, comme on dit. Mais les cadres supérieurs ont connu des jours meilleurs. En effet, quand on les rencontre, les sept individus, incarnés avec beaucoup de nuances par Philippe Cousineau, Alexandre Daneau, Sébastien Dodge, Danny Gilmore, Marie-Claude Giroux, Philippe Robert et Marie-Ève Trudel, sont engagés dans une thérapie de groupe, un crescendo de témoignages enflammés, une suite de jeux de rôle plus révélateurs les uns que les autres.

Autant de situations cathartiques dont l’objectif est de faire admettre, à des hommes et des femmes qui se sont toujours crus intouchables, qu’ils sont maintenant chômeurs. Est-ce normal, souhaitable, sain que toute une vie repose ainsi sur le travail? Sous nos yeux, non sans effort, les membres du groupe deviennent de moins en moins des machines et de plus en plus des humains.

Dans la mise en scène de Legault, on retrouve les mêmes qualités que dans les deux précédentes productions de la compagnie: une utilisation de l’espace extrêmement efficace, une direction d’acteur rigoureuse et cette manière unique d’insuffler de l’angoisse, de l’onirisme dans le réel. Si, en 12 ans, les mots de Widmer (traduits par Daniel Benoin) n’ont pas pris une ride, on peut dire que dans un contexte de crise boursière, en plein processus électoral, au Canada comme aux États-Unis, ils ont une résonance sidérante.

À voir si vous aimez /
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