Benoît Vermeulen : La route secondaire
Avec Au moment de sa disparition de Jean-Frédéric Messier, Benoît Vermeulen ramène en force le théâtre pour adolescents au Théâtre français du Centre national des Arts.
Lorsque Wajdi Mouawad a expliqué son choix de placer Benoît Vermeulen à la barre de la série Enfance/Jeunesse du Théâtre français du CNA, il a dit vouloir y loger un artiste avant tout, puis établir des ponts entre le théâtre jeunesse et pour adultes. Il allait donc de soi que la première saison reprenne sa mise en scène de la pièce Au moment de sa disparition, huitième production du Théâtre Le Clou, dont M. Vermeulen est également codirecteur.
Se consacrant au théâtre pour adolescents, le Théâtre Le Clou faisait appel au tournant de l’an 2000 à l’auteur Jean-Frédéric Messier qui, à la suite d’ateliers devant public, a écrit la pièce au même rythme que Benoît Vermeulen la montait sur scène. "J’ai toujours trouvé ses spectacles multidisciplinaires très éclatés, avec une facture et des thèmes pouvant rejoindre les adolescents", note M. Vermeulen au sujet de l’auteur, fondateur du Théâtre Momentum.
Comme embryon de la production récipiendaire de trois Masques, il y avait cette envie, partagée entre le dramaturge et le metteur en scène, de traiter des gens ayant des problèmes psychologiques. "On avait un ami maniacodépressif en commun qui nous apportait beaucoup, qui nous aidait à remettre en question une certaine conformité. On avait envie de montrer à quel point ces personnes peuvent nous faire prendre conscience de notre vision parfois réduite de la réalité", note-t-il.
Le personnage de JF (Michel Bérubé) a alors pris forme – celui de ce jeune homme perturbé qui part en cavale aux États-Unis avec son amie Soyal (Christine Beaulieu). Puis, un jour, dans le désert de l’Arizona, après sa rencontre avec la mythologie des Hopis, il disparaît. Une dizaine d’années plus tard, son jeune frère Dave (Christian Grenier) cherche à reconstituer les morceaux de puzzle de l’existence tourmentée de celui qui a grandi à ses côtés.
Si Benoît Vermeulen insiste sur le fait que la pièce s’adresse à un public de tous âges, il précise en quoi elle touche principalement le public adolescent. "La pièce est structurée comme un road movie théâtral, mais en réalité ça devient un voyage initiatique; la quête envers soi-même et la quête de sa place dans le monde. Ça passe par la fibre de cette problématique existentielle plutôt exacerbée à l’adolescence habituellement. Sans compter qu’on y suit vraiment une histoire."
Dans son approche, qu’il qualifie d’"artisanale", le metteur en scène a fait usage de projection vidéo, de musique, mais aussi de maquettes filmées en direct puis projetées sur écran. "J’avais peur du côté esthétisant de la vidéo; c’est toujours dangereux que ça bouffe les acteurs. Il y a des clins d’oeil ludiques avec l’utilisation de petites autos, de petits bonhommes hauts de trois pouces. Ce côté simple, gauche même, ou "fait maison", donne l’impression que les acteurs sont en contrôle de la machinerie de la vidéo", note-t-il.
Toujours en émerveillement devant "la portée émotive du texte et la magie simple" du spectacle, Benoît Vermeulen se réjouit de son parcours – qui l’a mené aux quatre coins du Québec et de l’Europe ces sept dernières années. Le road movie théâtral vient de reprendre la route; il sera présenté d’abord à Ottawa, puis à Sudbury et à Saskatoon.
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