Le Lion en hiver : Faire des histoires
Avec Le Lion en hiver, Duceppe nous offre une plongée confuse et manquant de substance dans l’histoire de l’Angleterre.
La pièce de James Goldman Le Lion en hiver est une histoire de manoeuvres politiques, d’alliances et de trahisons. Le jour de Noël 1183, Henri II Plantagenêt sort momentanément sa femme, Aliénor d’Aquitaine, du château où il la tient enfermée depuis des années pour discuter avec elle duquel de leurs trois fils lui succédera sur le trône d’Angleterre.
Pourquoi le choix d’Henri se porte-t-il d’abord sur Jean, un crétin manifeste? Pourquoi change-t-il à ce sujet d’avis comme de chemise? Pourquoi a-t-il fait emprisonner Aliénor? Dans toute cette histoire, il nous manque l’élément principal: la motivation. L’ensemble nous est présenté comme un simple duel oratoire entre Henri et Aliénor, dont on ne saisit pas bien s’ils s’adorent ou se haïssent.
Le ton adopté, léger et sarcastique, est en contradiction totale avec ce qui se joue sur scène: l’avenir d’un pays. Ce parti pris pourrait être intéressant – et il fonctionne d’ailleurs mieux durant la seconde partie de la pièce – si les fils du roi n’étaient pas aussi caricaturaux. Le roi de France, Philippe Auguste, est lui-même présenté comme un écervelé. Tout ceci ressemble à une mascarade sans queue ni tête, où les enjeux ne sont jamais clairement établis et où les monarques sont des girouettes.
La confusion est entretenue par la mise en scène de Daniel Roussel. De temps à autre, des silhouettes se faufilent sur scène et écoutent aux portes: qui sont ces gens, que font-ils là? À nous de l’imaginer. D’immenses tentures sont utilisées pour délimiter les espaces, et déplacées entre les scènes. Pourtant, une fois que cela est fait, les personnages se positionnent derrière celles-ci. En fait, la scénographie de Pierre Labonté est conçue de telle façon que les comédiens nous sont toujours partiellement invisibles. Quand ce ne sont pas les tentures, ce sont les poutres qui les dissimulent, ou le houx suspendu devant l’escalier, ou les rambardes de la mezzanine.
La pièce est sauvée par Michel Dumont, qui campe un roi d’Angleterre manipulateur à tendance despotique, et par Monique Miller, une Aliénor sans peur, mais avec quelques reproches! Malheureusement, les deux comédiens ne suffisent pas à justifier le déplacement.