André Sauvé : Humour échevelé
André Sauvé n’aime pas qu’on dise qu’il fait de l’humour absurde, car il s’intéresse avant tout à la folie humaine, pour mieux l’observer ensuite à la loupe.
"Si la vie est absurde, alors oui, je fais de l’absurde. Mais ce que je fais, c’est mettre une loupe sur des traits de personnalité et des comportements. Ce qui m’intéresse, c’est la folie humaine", lance André Sauvé avant de se lancer dans une anecdote qui illustre bien son propos.
"C’était l’Halloween, et j’étais dans un magasin La Source. Au comptoir, il y avait une dame dans la cinquantaine, accompagnée de ses petits-enfants, venue se faire rembourser un achat, et la madame n’était pas contente. Comme c’était l’Halloween, elle avait sur la tête un cerceau avec deux citrouilles montées sur des ressorts, et chaque fois qu’elle parlait, les citrouilles oscillaient. Si je me mettais la même chose sur la tête pour faire une chronique, on dirait que c’est de l’humour absurde. Mais ce n’est pas absurde, ça existe pour de vrai, je l’ai vu!"
Ainsi, une grande part de l’humour de Sauvé naît de ses observations: "Il m’arrive de m’inspirer des autres, mais c’est surtout moi que j’observe et il y a assez de matière pour une couple de one man shows", rigole-t-il. Depuis qu’il a été "découvert" en 2004 par Yvon Deschamps (il n’en revient toujours pas) au Festival de la chanson et de l’humour de Dégelis, dans le Bas-Saint-Laurent, le phénomène André Sauvé s’est répandu comme une traînée de poudre. C’est avec impatience que ses adeptes attendent son premier solo, un spectacle qui a pour thème central le contrat de vivre avec soi-même.
À SA FAÇON
Celui qui ne se considère pas comme un humoriste, mais plutôt comme un comédien qui fait rire les gens, est très conscient des attentes du public, mais il a fait de son mieux pour ne pas trop y penser durant la rédaction de son spectacle éponyme. "Je suis conscient que certains de mes numéros, notamment ceux présentés pendant les Galas Juste pour rire (et qu’il reprend dans son spectacle), ne sont pas toujours faciles à suivre. Quand j’écris, je ne pense pas aux gens. Je ne veux pas leur donner la cuillerée à la bouche. Je fais 50 % du chemin, qu’ils fassent l’autre 50 %. Le risque, quand on pense au public, c’est d’aller vers la facilité."
Si l’homme écrit tous ses textes, il avoue qu’il s’agit d’une corvée qu’il n’apprécie guère. "Je n’aime pas écrire, car c’est un processus aveugle. C’est instinctif, mais ce n’est pas confortable, car je ne sais pas toujours où je m’en vais", explique Sauvé avant de préciser que Pierre Légaré lui a donné un coup de main en relisant ses textes et en lui donnant des conseils. "Il m’a montré des avenues, mais j’ai trouvé mon chemin tout seul."
Contrairement à la plupart des humoristes, il n’a jamais eu l’intention de fréquenter l’École nationale de l’humour. "Je ne suis pas contre les écoles établies, mais j’ai toujours senti que ce n’était pas mon chemin à moi. Je fais un atelier ici et un stage intensif là. Je suis claustrophobe mentalement. Je ne veux pas me sentir pris dans un moule. C’est pour ça que je ne veux pas donner un nom à mon humour. Je ne veux pas m’encapsuler. Aussitôt qu’on me montre une clôture, j’ai juste le goût de mettre le pied de l’autre bord!"
S’il devait absolument nommer son style, il dirait que c’est de l’humour existentialiste, comme le lui a déjà fait remarquer son metteur en scène, Pierre Bernard. "J’aime les gens qui font leur propre chemin, comme Marc Labrèche, Bruno Blanchet ou Andy Kaufman. J’ai choisi de faire confiance à ce qui m’attire et de creuser mon propre sillon."
C.V.
André Sauvé est né à Lachine en 1965. Après avoir beaucoup voyagé et gagné sa vie en massothérapie et en psychothérapie, il étudie, pratique et enseigne le bharata natyam, une forme de danse indienne, de 1989 à 1998. Il apprend ensuite la danse butô et pratique le mime corporel avec la compagnie Omnibus, en plus de faire du théâtre. En 2004, à la suite d’un pari lancé par l’animateur de l’émission Les Menues Manies à CISM, où il est chroniqueur, Sauvé présente le numéro La Confusion au Festival de Dégelis. Il est remarqué par Yvon Deschamps, qui lui présente son gérant Pierre Rivard. Il est ensuite nommé Révélation de l’année au Festival Juste pour rire en 2006, devient reporter-vulgarisateur à l’émission 3600 secondes d’extase à Radio-Canada, en plus d’écrire pour Le Sketch Show à TVA. Pour couronner le tout, il est sacré Découverte de l’année au Gala Les Olivier 2008.