Contes urbains : C't'une fois un gars
Scène

Contes urbains : C’t’une fois un gars

Efficaces, atypiques et survoltés, les Contes urbains sont encore un passage obligé par La Licorne cette année.

Les Contes urbains, c’est toujours un plaisir fou, une sorte de combinaison désordonnée de rire, d’attendrissement, d’admiration, de répulsion et d’étonnement. Il y a de tout pour tous, dans une ambiance décontractée, l’air de dire que le théâtre devrait plus souvent se prendre moins au sérieux.

Après les premières notes de guitare du très doué Eric Asswad, ça commence en douceur avec une Linda Roy très naturelle dans la peau d’une mère venue raconter un passé enfoui: l’histoire d’une rencontre qui fait remonter à la surface un souvenir de stripteaseuses vengeresses. Le texte d’Harry Standjofski et Danette Mackay, traduit par Daniel Gauthier, emprunte sa structure à la logique de la mémoire et livre le témoignage touchant d’une femme à la croisée des chemins.

De là, on atterrit illico dans l’univers d’un graffiteur marginal interprété avec beaucoup de verve par Emmanuel Schwartz. Impossible de résister à cette aventure rocambolesque imaginée par Greg MacArthur (et traduite par Schwartz), dans laquelle l’artiste sera victime d’un étonnant revirement de situation chez Harper Pharmaceutics. En filigrane, vous l’aurez compris, le texte critique les politiques culturelles conservatrices. Bien joué.

David Boutin, lui, a composé un personnage plus caricatural pour défendre le texte de Josée Bilodeau. Dans la peau d’une brute au coeur tendre, il donne une performance fulgurante. Le conte suivant, M’ssieu Douglâsse, permet à Joël Marin de se livrer à de saisissantes prouesses vocales, dans une histoire glauque et tragique d’Yvan Bienvenue.

La deuxième partie débute en flèche avec le récit d’un réveillon éprouvant. Marie-Ève Perron y dénonce, sans subtilité mais avec une énergie très combative, le règne de la superficialité et de la téléréalité. Elle frappe dans le mille. Plus étrange est ce conte sordide d’André Ducharme interprété par un inquiétant Sébastien René; on est ici du côté très obscur des festivités.

Les acteurs disposent de peu de temps de répétition pour les Contes urbains, et il semble que Didier Lucien en ait souffert cette année. Le soir de la première, il avait remplacé son conte par un numéro de son cru en attendant de maîtriser son texte. Lors de mon passage deux jours plus tard, il a dû s’arrêter dès le début de sa livraison du conte de Standjofski. Dommage. Cette situation devrait être rétablie au moment de publier ces lignes.