Viola Léger : Viola en quatre temps
Scène

Viola Léger : Viola en quatre temps

Viola Léger revisite les mémoires et tourmentes de quatre femmes créées par son auteure fétiche dans Antonine et Viola, c’est pas juste la Sagouine!

La comédienne acadienne Viola Léger entamait la quarantaine lorsqu’elle reçut le coup de fil de son ancienne enseignante devenue amie, Antonine Maillet, qui lui proposait le rôle-titre de sa nouvelle pièce, La Sagouine. Alors installée à Paris pour parfaire ses études en théâtre à la prestigieuse École Jacques-Lecoq, elle accepte illico et rentre au pays. Le fascinant personnage de femme de ménage au franc-parler allait naître de leur collaboration pour ne jamais s’éteindre. Créée en Acadie en 1971, la pièce a depuis été jouée plus de 2000 fois partout au Canada, tant en français qu’en anglais. "J’ai eu la chance de grandir avec la Sagouine dans ma vie d’adulte. À 41 ans, on commence à en avoir vu des choses, mais elle, à 72 ans, a rencontré des années difficiles. Elle dit les choses telles qu’elles sont avec pour mot d’ordre le gros bon sens qui prime sur tout: l’argent, la politique, la maladie… Elle n’a rien à perdre", raconte de sa voix chantante Mme Léger, qui ne se serait alors jamais doutée qu’un tel succès l’attendait.

Poursuivant sa carrière de comédienne, elle incarnera des rôles de divers auteurs, mais reviendra toujours aux textes d’Antonine Maillet. "La Sagouine me va comme un gant! Quand Mme Maillet écrit, je la comprends, je n’ai pas besoin d’explication. C’est peut-être l’identité acadienne, parce que c’est tellement nous autres, c’est tellement ça!"

Dans la respiration quotidienne

En grand ami et admirateur de la comédienne, Gilles Provost rêvait depuis des lustres de faire renaître ces autres personnages vigoureux qu’Antonine avait couchés sur papier et auxquels Viola avait donné corps à différentes occasions. C’est dans cette optique qu’il concocta le spectacle Antonine et Viola, c’est pas juste la Sagouine! dont il assure la mise en scène.

Dans la première partie, trois personnages viendront causer de leurs souffrances et obsessions. Il y a d’abord Aglaé, 75 ans, une amoureuse qui se résigne à son statut de vieille fille. Vient ensuite Babée, qui contemple du haut de sa finitude le déroulement de ses funérailles. "Imaginez-vous si les morts pouvaient nous parler!" Puis surgit Marichette, l’obsessive, qui n’en a que pour les numéros chanceux. "C’est une folle de bingo! Ça représente n’importe quelle maniaque de quoi que ce soit. Elle critique les excès des autres, mais c’est elle qui est débalancée." Malgré leur apparente vulnérabilité, elles ont toutes des leçons à inculquer: "Elles livrent de grands messages, mais plantés dans la respiration de tous les jours; on ne réalise pas tout de suite leur ampleur. Ce n’est pas à l’université, dans l’éducation ou dans de gros livres épais. C’est ce que l’on vit maintenant. Antonine a le don de capter ces situations."

Et bien que travailler avec "le grand homme de théâtre" Gilles Provost symbolise de belles retrouvailles pour Mme Léger, il n’en reste pas moins que la tâche est imposante. "Je trouve que M. Provost fait pitié! C’est jamais une partie de plaisir avec moi. Je suis très exigeante envers moi-même! Je porte une soirée seule, alors je suis énervée! C’est un gros boulot, et M. Provost croit en moi. On travaille très fort!" assure en conclusion Mme Léger.

À voir si vous aimez / La Sagouine d’Antonine Maillet, Grace et Gloria de Tom Ziegler