Philippe Cohen : Concentrés d’humanité
Grâce à Danse Danse, le Ballet du Grand Théâtre de Genève se pose à Montréal pour la première fois avec un programme triple excentrique réunissant Japon, Grèce et Belgique. On en discute avec Philippe Cohen, directeur artistique du BGTG.
Les résonances entre les oeuvres Para-Dice du Japonais Saburo Teshigawara, Selon désir du Grec Andonis Foniadakis et Loin du Belge d’origine marocaine Sidi Larbi Cherkaoui, à première vue, sont difficiles à cerner. Décrites tour à tour comme un univers aérien, une transe baroque et une macédoine culturelle, qu’est-ce que ces pièces aux esthétiques que tout sépare peuvent bien avoir en commun?
Le fil conducteur existe pourtant, nous dit Philippe Cohen. Directeur artistique du Ballet du Grand Théâtre de Genève, il a insufflé une énergie nouvelle à la compagnie à son arrivée en 2003, si bien que celle-ci est désormais reconnue partout en Europe et au-delà pour son inventivité. Ce triplé qui a fêté sa 100e représentation en novembre dernier en est une des plus importantes manifestations. "Ces trois pièces ont bien sûr une identité extrêmement forte et personnelle, avec des partis pris très affirmés. Mais elles ont en commun une profonde humanité et une certaine spiritualité. Sur scène, plutôt que des danseurs, je dirais que nous avons affaire à des hommes et des femmes qui dansent et qui s’adressent à des hommes et des femmes qui assistent au spectacle."
Selon Cohen, cette universalité du propos trouve son aboutissement le plus fort dans la dernière pièce du programme, celle de Cherkaoui. "Parce qu’il exploite le mélange des cultures – ce qu’il a déjà en lui -, Cherkaoui donne vraiment à sa pièce une dimension universelle. Il a utilisé tout le potentiel des 22 danseurs – qui rassemblent à eux seuls 12 nationalités – en puisant à même leur culture personnelle. Peu importe où l’on se trouve dans le monde, chacun peut s’identifier à sa façon au propos", estime celui qui se dit très excité à l’idée de venir enfin à la rencontre du public québécois.
Quant aux deux autres pièces, elles sont a priori aux antipodes, bien qu’elles aient la même durée, à quelques secondes près. "Je trouvais intéressant de montrer comment, dans le même temps, on peut produire des oeuvres aussi différentes, mais qui abordent les mêmes notions d’humanité et de spiritualité", raconte Cohen.
Chorégraphe le plus influent au pays du soleil levant, obsédé par les relations entre le mouvement, le temps et l’air, Teshigawara a créé un "parcours méditatif-poétique où la danse se déroule de façon très calme, organique et légère, où on a l’impression de participer à un moment qui était déjà commencé avant qu’on arrive et qui se continue après la tombée du rideau", résume le directeur artistique.
À l’autre bout du spectre, le Grec Foniadakis explore les contrastes entre élévation spirituelle et enracinement terrestre en utilisant la musique de Bach pour accoucher d’une pièce "complètement virtuose, mettant de l’avant une danse extrêmement physique, tonique, décomplexée et ébouriffante", nous dit Cohen. Une véritable transe baroque, donc, qui tient les spectateurs en haleine… et les danseurs aussi! Communion à l’horizon?
Du 5 au 7 février
Au Théâtre Maisonneuve de la PdA
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