André Viens : Plus grand que nature
À la tête du Théâtre Sans Fil, André Viens propose une version contemporaine et musicale du conte Hänsel et Gretel.
Avec Hänsel et Gretel, le Théâtre sans fil, actif depuis 1971, faisait en 2000 une entorse à son principe de monter des spectacles de marionnettes géantes avant tout pour adultes. Évitant de reconstituer une copie conforme du conte des frères Grimm, il propose sa version personnelle de l’histoire, qu’il enrobe de la musique de Humperdinck adaptée par Jean-François Léger. Une création fantastique qui s’apparente légèrement à un spectacle de Broadway, soutient André Viens, directeur artistique et metteur en scène.
Oubliant le personnage de l’horrible belle-mère, la compagnie a imaginé une trame narrative un peu moins dramatique. Dans cette fiction, c’est la mère, choquée que Hänsel et Gretel se soient amusés au lieu de travailler, qui leur demande d’aller cueillir des fraises dans les bois afin que toute la famille, pauvre, puisse manger. Mais voilà qu’en parlant avec son mari, elle comprend qu’elle a envoyé ses enfants dans la gueule du loup, à quelques pas de la maison de la sorcière Grignote.
La femme, inquiète, part alors à leur recherche. "Notre sorcière, on l’a voulue plus folle que méchante, explique Viens. L’oeuvre recèle des parties qu’on pourrait appeler cruelles: la sorcière prend les enfants et les fait cuire pour en faire des biscuits, des gâteaux; à la fin, Hänsel et Gretel, pour échapper à la sorcière qui veut les manger, la poussent dans le feu. Elle devient alors un gros pain d’épice. Il y a une notion de cruauté dans ces gestes, mais en même temps, on sait bien que c’est un conte populaire. Moi, je suis sensible à cela et je n’aurais pas pu le montrer d’une façon sérieuse."
En fait, s’il déteste la violence sous toutes ses formes, André Viens accepte une portion de celle qui existe dans le récit. Il en tire même une certaine morale: "Ce qui est intéressant dans cette histoire, c’est que les enfants usent de subterfuges pour se défaire de la méchante sorcière, mais en même temps, il y a peut-être d’autres solutions que de la brûler… Dans le fond, ça veut peut-être dire que, dans nos vies, comme êtres humains, on devrait brûler nos propres monstres. Quand on a des moments, des étapes difficiles et des peurs, il faut apprendre à affronter nos monstres et à les détruire pour passer à autre chose."