Jérémie Niel : De l'autre côté
Scène

Jérémie Niel : De l’autre côté

En résidence à La Chapelle, la compagnie Pétrus et son metteur en scène attitré, Jérémie Niel, présentent Tentatives, une pièce en deux temps qui aborde l’errance sous divers éclairages. Échange.

Il a la dégaine d’un intello sympathique. Éloquent et soucieux de la précision de ses propos, Jérémie Niel réfléchit à voix haute et ne dissimule jamais le mouvement de sa pensée. Pourtant, il craint vivement l’étiquette, et précisera à quelques reprises son désir de faire un théâtre très concret et de s’adresser aux émotions. "Tentatives n’est pas un spectacle intellectuel, c’est un constat très simple sur l’errance et la recherche de sens. Il faut écouter la pièce avec ouverture d’esprit et curiosité, mais c’est aussi très physique, émotif – il y a une grande part de sensorialité dans le spectacle."

Comme sa plus récente pièce, Son visage soudain exprimant de l’intérêt, Tentatives est un spectacle en deux parties. Deux visions d’une même histoire se confrontent et se répondent, mais aussi deux visions du théâtre, du réalisme à l’onirisme, du concret à l’abstrait. Ça commence par un souper d’amis, et ça se termine ailleurs, comme si une brèche était soudainement ouverte par l’un des convives, permettant de plonger dans un espace souterrain, un lieu de pulsion et d’explorations sensuelles.

"On l’aperçoit soudain débarrassé de son image sociale, précise Niel, comme s’il prenait du recul et nous faisait partager ce qu’il en retire. Sur scène, c’est fait de manière très corporelle; mon interprète principal est d’ailleurs un acteur-danseur. On travaille d’abord sur différents registres, entre la violence et le comique, on le traite comme un trop-plein d’émotions ingérable et ambigu. Et dans la deuxième partie, c’est plus onirique, moins chargé, plus silencieux; on y voit le personnage expérimenter l’errance avec tout ce que ça implique de questionnements, de fausses routes et, au final, de sérénité."

Avec Evelyne de la Chenelière, Denis Gravereaux, Eric Robidoux, Eric Forget et Marika Lhoumeau, Niel a poursuivi une démarche d’écriture scénique dans laquelle le corps, le son et le texte sont les matières premières d’un travail collectif. "Il n’y a pas de texte écrit, même s’il y a beaucoup de paroles dans la première partie, car on a beaucoup travaillé à partir d’improvisations dirigées, et je veux conserver cette spontanéité-là. C’est nouveau chez moi. D’habitude, je suis plutôt maniaque de la précision, mais on cherche cette fois à trouver des moyens de perturber les schémas préétablis pendant la représentation, de conserver la spontanéité du jeu."

Le jeune metteur en scène, diplômé du Conservatoire d’art dramatique de Montréal en 2005, est aussi fasciné par les possibilités de l’amplification de la voix. Ceux qui ont vu ses spectacles précédents se rappelleront les puissants effets créés par l’amplification des chuchotements ou des respirations. "Le micro agit un peu comme un zoom, explique-t-il, il met de l’avant une parole plutôt qu’une autre, crée une distance entre le corps et la voix, rapproche des corps physiquement éloignés, dévoile des dimensions du corps que les yeux ne peuvent pas voir. Il y a là un travail très riche dont je n’ai pas du tout épuisé toutes les possibilités." Ça promet.

Consultez la page du Théâtre La Chapelle au www.voir.ca/lachapelle