Réveillez-vous et chantez! : Chant de révolte
Scène

Réveillez-vous et chantez! : Chant de révolte

Réveillez-vous et chantez!, une nouvelle mise en scène de Luce Pelletier dans le cadre du Cycle états-unien de l’Opsis, est un rendez-vous à demi réussi.

La directrice artistique du Théâtre de l’Opsis, Luce Pelletier, tenait à mettre en scène Clifford Odets, importante figure des années 30. L’intention est louable, et il est incontestablement pertinent de porter aujourd’hui notre regard sur la crise économique de l’époque. Même si elle n’a pas choisi ce texte pour cette raison, l’histoire d’une famille new-yorkaise appauvrie par la crise incite à l’exercice de la comparaison.

À force de montrer le grand-père Jacob (Albert Millaire) défendre le marxisme, la représentation brandit un tas de questions sur notre crise. Où sont passés les révolutionnaires? Y a-t-il encore des idéaux capables de réveiller la foule? Cela dit, la réponse n’est pas plus claire en 1933 qu’aujourd’hui. Le vieux Jacob se heurte au conformisme obstiné de sa fille (autoritaire Annick Bergeron) comme les révolutionnaires contemporains se heurtent au cynisme ambiant. Plus ça change, plus c’est pareil.

Malgré la pertinence, il y a quelque chose d’inconvenable à présenter aujourd’hui cette pièce très datée, avec ses dialogues peu subtils et ses visées propagandistes à peine dissimulées. Et si la relation du grand-père avec son petit-fils Ralph (François Arnaud) est dramatiquement riche, les intrigues reliées aux autres personnages ne sont pas assez étoffées pour susciter l’intérêt. Entre les deux hommes que deux générations séparent, la transmission du savoir a de quoi émouvoir et provoquer la réflexion. Mais les personnages secondaires (interprétés par Bergeron, Henri Chassé, Evelyne Brochu et Jean-François Casabonne) oscillent entre la caricature et l’humanité, ne trouvant jamais leur nid.

Dans un décor très réaliste et étonnamment chargé malgré ses portes et fenêtres érigées dans le vide (Olivier Landreville), la mise en scène est plutôt conventionnelle et s’appuie sur le talent des acteurs. Millaire, surtout, compose un vieillard magnifiquement torturé entre ses aspirations intellectuelles, sa faiblesse physique et l’écrasante pression familiale dont il est victime. Orchestré par Pelletier, le dialogue est très rythmé. On se laisse prendre par le récit malgré ses faiblesses, de même que par quelques images fortes, comme ces portes s’ouvrant solennellement pour dévoiler les personnages figés au début de chaque acte.