Jacques Laroche : Michel et le Loup
Scène

Jacques Laroche : Michel et le Loup

Jacques Laroche signe la mise en scène des Essais d’après Montaigne du Théâtre du Sous-marin jaune. Quand le Loup bleu se fait son cinéma.

Après nous avoir offert Candide, La Bible et Le Discours de la méthode, voilà que le Théâtre du Sous-marin jaune s’attaque aux Essais de Michel de Montaigne, un autre "jalon de la pensée humaine", une autre "oeuvre qu’on sait importante, mais qu’on ne connaît pas autant qu’on devrait", note le comédien et metteur en scène Jacques Laroche. Quant à ce qui a motivé ce choix, il explique: "Montaigne est un peu le précurseur de Descartes, c’est lui qui a amené l’idée de douter de tout et de réfléchir par nous-mêmes. Aussi, son époque est marquée par le début de l’humanisme; Christophe Colomb vient de prouver que la Terre est ronde, Machiavel commence à dire aux dirigeants comment faire leur travail, Gutenberg édite la première Bible. Il y a une grande ouverture sur plein de possibilités et c’est aussi à ce moment qu’on voit le plus de guerres de religion en France." Ce qui n’est pas sans lui rappeler la réalité actuelle. "Avec Internet et l’information qui n’a jamais aussi bien circulé, on devrait être capables de bâtir quelque chose, mais on constate au contraire une accentuation de l’extrémisme", poursuit-il.

D’après les échos qui sont parvenus à l’acteur depuis la création du spectacle l’automne dernier, le public retrouve avec bonheur l’intelligence, l’humour et l’audace ayant fait la marque de la compagnie. Tout en paraissant agréablement surpris par le mode inédit sur lequel lui est livré ce survol du siècle, de la vie et des essais de Montaigne. "Montaigne a inventé un nouveau genre et il se rapportait beaucoup à lui, à ses intuitions, donc, on a fait un peu la même chose, on a fait un essai", raconte-t-il. Passionnée de théâtre, bien sûr, mais aussi de cinéma et de rock’n’roll, l’équipe a donc concocté une pièce qu’il qualifie de "baroque". "On a décidé de tourner un film et de le postsynchroniser sur scène avec une batterie, une guitare et des micros, précise-t-il. Aussi, en manipulant la caméra, on s’est rendu compte que c’était tout un langage: le cadrage, le montage… En fait, il s’agit d’une autre marionnette."

Une de plus, donc, puisque le film repose lui-même sur des pantins en tous genres, grâce auxquels les artistes peuvent notamment créer des scènes à grand déploiement, comme "des armées en route, une foule qui marche dans les plaines françaises ou le massacre de la Saint-Barthélemy", illustre-t-il. Parmi ces personnages se trouve enfin le Loup bleu, directeur artistique de la compagnie, qui se présente cette fois sous un jour légèrement différent. "Il a toujours été un peu omniscient, il remettait le monde à sa place. Là, il s’est découvert un côté plus humain et il apprend l’amitié", remarque-t-il. Peut-être en raison du message de tolérance se dégageant, selon Laroche, des prises de position éminemment changeantes de Montaigne, pour qui "il n’y avait rien de plus incertain que les certitudes", résume-t-il.