Larry Tremblay : Mathématiques de l’identité
Quinze ans qu’il n’était pas monté sur les planches… Le prolifique dramaturge Larry Tremblay retrouve la scène, dans deux pièces pour le prix d’une, présentées au Théâtre Périscope.
Le Problème avec moi et Le Déclic du destin sont deux courtes pièces "absurdes, cocasses et un petit peu métaphysiques", nous dit Larry Tremblay. Deux textes autonomes, écrits à 30 ans d’intervalle, mais qui ont le même personnage central, Léo. La première présentée, Le Déclic du destin, Tremblay l’évoque avec fierté: "C’est le texte qui a démarré ma carrière et c’est le premier texte que j’ai publié." Michel Cochet, metteur en scène français, l’a montée avec succès au début des années 2000 à Paris et à Avignon; tellement qu’il a alors imploré Tremblay de donner une suite à cette histoire. Ça a donné Le Problème avec moi. Voilà pour la petite histoire.
Dans Le Déclic, le public découvre Léo, un homme qui va perdre successivement toutes les parties de son corps. Les doigts, la langue, la tête, alouette, alors que dans Le Problème avec moi, le personnage rencontre son double, LéØ, au hasard d’une rue. Bref, une affaire de division dans la première pièce, de multiplication dans l’autre. "Je me suis inspiré de cette mathématique pour réfléchir sur la perte d’identité, sur comment se fabrique une personnalité", analyse l’auteur.
En écrivant la suite des aventures de Léo, Larry Tremblay n’avait pas décidé d’y tenir un rôle, "et heureusement! raconte-t-il. Sachant que j’aurais à dire telle ou telle réplique, je me serais peut-être un peu censuré. J’aurais sûrement eu tendance, inconsciemment, à opter pour un peu plus de facilité, car ce n’est pas facile à jouer!"
Et c’est quoi, au juste, le problème avec Léo? Son quotidien monotone. Son travail de bureau routinier et sa vie sans but. Un peu comme le gratte-papier de Kafka. "Le Déclic du destin est un texte d’adolescence, une époque où je subissais joyeusement beaucoup d’influences. Quand on est jeune, on a besoin de se reconnaître… et c’est toujours plus intéressant de se reconnaître dans les grands auteurs que dans les plus petits!" dit Tremblay dans un éclat de rire.
Même s’il n’était pas monté sur scène depuis 15 ans, sa décision de renouer avec les planches n’a pas fait l’objet d’une longue réflexion. "Je suis Bélier, alors j’ai foncé! Puis j’avais tellement envie de travailler avec Carl Béchard (son double sur scène) et la metteure en scène Francine Alepin, qui a composé une véritable partition gestuelle." Lors de la création en 2007 à l’Espace Libre, Tremblay a pu vérifier qu’il n’était pas rouillé. "Ça passait ou ça cassait… et ça a passé!"