Le Baiser de la veuve : Erreur de jeunesse
Scène

Le Baiser de la veuve : Erreur de jeunesse

Mario Borges met en scène Le Baiser de la veuve, d’Israël Horowitz, une pièce traitant des conséquences psychologiques graves d’un secret bien gardé.

La souffrance des bourreaux vaut-elle moins que celle des victimes? C’est la question que semble vouloir poser le metteur en scène Mario Borges avec Le Baiser de la veuve, de l’auteur américain Israël Horowitz. On y relate la difficile confrontation de deux jeunes hommes dans la trentaine, Kevin (Marc-François Blondin) et Benoit (Antoine Bertrand) et d’une ancienne camarade de classe, Élisabeth (Julie Beauchemin), violée par ceux-ci et tous les autres garçons de l’école sept ans plus tôt. "On a souvent peur d’aborder le thème du viol collectif, affirme Borges. Pour moi, il s’agit bel et bien ici de trois solitudes. Trois solitudes qui se retrouvent après avoir rangé très loin un événement tragique qui a changé leur vie à jamais."

"Il ne faut pas que les gens pensent qu’on diminue le drame de la victime, poursuit Borges. À ce sujet, cette pièce est bien ficelée, il y a des revirements de situation. Ce n’est pas simple. Mais je n’ai voulu juger aucun des trois personnages. Ce serait unidimensionnel, donc inintéressant."

Outre un personnage de victime assez complexe, la pièce présente deux types d’agresseurs. "Kevin est le leader, il est dans une recherche de reconnaissance. Il a tellement peur d’être blessé qu’il cherche à tout contrôler. Alors que Benoit, c’est celui qui a toujours été différent des autres. C’est un coeur immense mais malhabile. Il a, bien sûr, subi l’effet d’entraînement, mais en posant ce geste, il a tenté de donner de l’amour. Sept ans plus tard, les garçons n’ont pas tant changé, alors que la victime, qui a quitté la ville, a fait du chemin de son côté."

La pièce d’Horowitz questionne donc le passage du temps sur l’événement tragique. "Habitant un petit bled, ces trois individus ont toujours été à l’école ensemble. Et puis un jour, le drame arrive, la synergie se brise. Dans cette pièce, chacun est confronté au cheminement qu’ont fait les autres pendant ces sept années d’absence. C’est l’intérêt d’une rencontre de trentenaires…"

Pour servir le propos, Borges a mis la direction d’acteur à l’avant-plan: "Cette pièce m’apparaissait éminemment théâtrale – de par la densité des émotions – mais aussi hyperréaliste. C’est un très beau défi. Les codes sont davantage dans les regards que se jettent les acteurs, dans leurs non-dits, plutôt que dans un décor élaboré."