Benoît Brière : Avoir le rythme
Benoît Brière enchaîne les projets au théâtre, au cinéma et à la télévision, et suit les traces de Louis de Funès dans la pièce Oscar, qu’il produit pour le Théâtre du Vieux-Terrebonne cet été. Physique.
Benoît Brière est à la course. Entre deux tournages, pour le prochain film de Luc Dionne et la série télé Le Musée d’Éden, réalisée par Alain Desrochers pour Radio-Canada, et le lancement des saisons 2009-2010 du TNM et de la Compagnie Jean Duceppe, à peine le temps d’un raccord coiffure. "Ma femme me trouvait pensif cette semaine…" Occupé, mais volubile, l’acteur-metteur en scène vient de renouveler son contrat avec le Théâtre du Vieux-Terrebonne, pour lequel il agit à titre de directeur artistique du théâtre d’été depuis trois ans. Et à partir de juin, il monte sur scène pour y interpréter le rôle principal de la pièce Oscar, de Claude Magnier, mise en scène par Alain Zouvi. Un rôle popularisé en France par Louis de Funès.
Dix-huit ans. C’est le temps qu’il aura fallu pour que le projet prenne forme. "Alain et moi en parlons de manière récurrente depuis notre première rencontre, au début des années 1990. C’est presque un gag entre lui et moi. Il prétend que j’insiste depuis des années et moi je lui dis qu’il me casse les oreilles avec ça." Presque 20 ans plus tard, c’est finalement Benoît Brière qui saisit l’occasion de monter la pièce et engage Alain Zouvi à la mise en scène. "Un jour, l’automne dernier, je me suis réveillé en me disant: "J’ai les moyens de le faire", on est allés prendre un café, et je lui ai sorti le contrat en lui disant: "On le fait." Je l’ai viré de bord."
PORTES QUI CLAQUENT
Oscar, c’est 10 acteurs, "pas rien, un gros show", et surtout une nouvelle occasion de se frotter à un genre théâtral dont l’acteur et metteur en scène est friand. "Avec Ténor recherché, on m’a dit qu’on faisait du Feydeau à l’américaine, avec Silence en coulisses!, du Feydeau à l’anglaise. On va bien finir par faire du Feydeau pour vrai!" lance-t-il en riant, avant d’ajouter, plus sérieux: "Ce n’est pas encore tout à fait ça, mais Oscar est dans la lignée de ce type de théâtre: un rythme extrêmement précis, rigoureux, une pièce mathématiquement conçue. Monté mollement, ça ne donne rien, il faut savoir respecter le rythme imposé par l’écriture de Magnier."
Respect, encore, lorsqu’il s’agit d’adapter l’univers de l’auteur: "On s’est demandé si on devait moderniser la pièce, et la traduire pour la rendre plus locale. Une page et demie plus tard, on s’est rendu compte que c’était impossible. L’écriture de Magnier possède une respiration, une musique tellement française, parisienne, que ce serait la dénaturer. On ne modernise pas Feydeau." Classique, donc, la mise en scène. Des portes qui claquent, des costumes et des décors typiques de la fin des années 60, "les cheveux, c’était quelque chose!", et un Bertrand Barnier à la hauteur de celui campé par Louis de Funès. "On n’échappera pas à la comparaison, alors on essaie de ne pas trop y penser. Je ne vais pas refaire la scène du nez mais il faut que ça colle à ce qui se passe dans l’histoire, à la didascalie."
Pétages de plombs garantis. Le personnage de Bertrand Barnier, qu’incarne Benoît Brière, atteint des sommets d’hystérie dans cette pièce. Victime de ce qu’il a semé, il ne parvient plus à s’extraire d’une situation à l’intérieur de laquelle jeux d’argent, de pouvoir et de séduction s’entremêlent. "Bertrand Barnier est d’une extrême autorité, colérique avec sa femme, sa fille et ses employés. Mais il est aussi très facile à avoir parce qu’il prend toutes ses décisions sous le coup de l’émotion. C’est un vrai bordel, la pire journée de sa vie!"
OSCAR
La pièce Oscar a été écrite en 1958 par Claude Magnier. Elle a connu un immense succès populaire en France, notamment grâce à l’interprétation du personnage de Bertrand Barnier par Louis de Funès, à la fois au théâtre et au cinéma, dans une adaptation d’Edouard Molinaro en 1967. L’histoire: Christian Martin, modeste employé du promoteur Bertrand Barnier, vient surprendre son patron au saut du lit pour lui demander la main de sa fille et lui révéler qu’il a détourné 64 millions de francs. Au fil de l’intrigue, le rapport de force s’aggrave entre les deux protagonistes, qui se livrent à de mutuelles arnaques autour d’une valise pleine d’argent, le tout donnant lieu à des situations de plus en plus rocambolesques, et Bertrand Barnier devenant de plus en plus hystérique…