Stéphane Crête : Champignons magiques
Scène

Stéphane Crête : Champignons magiques

Stéphane Crête s’amène à l’Espace Go avec un nouvel objet expérimental. Produit par Momentum, Mycologie s’annonce aussi sérieux que délirant.

Matin ensoleillé. Visiblement réveillé depuis longtemps, Stéphane Crête boit doucement un thé pendant que le journaliste, compulsant ses notes, se demande par quel bout commencer l’entrevue. C’est que la nouvelle création de l’inclassable metteur en scène emprunte des avenues fort diverses.

Pas question de s’attarder sur la fable, même si, promet-il, "la pièce racontera bel et bien une histoire, avec un début, un milieu et une fin". "Ce sont des personnages en quête de quelque chose, qui se croisent. Il y a un animateur d’émissions culinaires, un médecin spécialisé dans les mycoses humaines, un jeune couple de héros shakespeariens: tous des personnages à la recherche d’absolu." C’est tout. On n’en saura pas plus sur ce sujet épineux.

Quand on le fait parler de science et de champignons, Crête est bien plus bavard. Depuis Les Laboratoires Crête en 2001, expérience théâtrale dans laquelle des acteurs étaient soumis à des "modifications de la conscience", il ne s’est plus trop aventuré à la jonction de la science et du théâtre. Il a aussi très peu travaillé avec le collectif Momentum, au sein duquel sont nées ses interrogations scientifiques. Mais ses recherches ne pouvaient s’arrêter là, car Crête persiste à percer le "mystère de vivre".

Rat de bibliothèque, il s’est lancé dans une série de recherches sur le caractère sacré du champignon. S’il a parfois bifurqué vers le "vaste monde de la cueillette des champignons sauvages" et s’est amusé à découvrir la poésie derrière les noms des champignons (il cite le coeur de sorcière et le ganoderme luisant), il a plutôt cherché à comprendre comment, dans plusieurs cultures, "les champignons sont des enthéogènes, c’est-à-dire des substances que l’on prend pour se rapprocher du divin en soi". "Ça m’a fasciné, poursuit-il, de lire certains chercheurs qui affirment que le champignon hallucinogène a été fondamental pour l’homme des cavernes, parce qu’il lui a permis de prendre conscience de soi et de soudainement réfléchir aux questions d’absolu." Rien de moins.

Mycologie nous promet donc toutes sortes de transes – hallucinogènes, métaphysiques, érotiques – mais aussi des morts violentes, des agonies et des moments d’inconscience. Pour ses acteurs (Guillaume Chouinard, Stéphane Demers, Dominique Leduc, Gabriel Lessard, Marianne Marceau et Gilles Renaud), Stéphane Crête a créé une partition de jeu éclatée qui va d’un extrême à l’autre, "du non-jeu jusqu’à la tragédie sanglante". S’il n’y avait que ça! L’expérience qu’il dit vraiment vouloir tenter cette fois, "c’est de voir si, à travers des contes, des mythes, des symboles et des archétypes, on peut toucher à l’inconscient des spectateurs, leur parler à un autre niveau".

En cela, il s’inspire du mouvement panique, qui a inventé la psycho-magie, une sorte de thérapie par le théâtre. "Selon moi, c’est un spectacle pour psychanalystes", conclut-il. On conseillera donc à tous les autres d’aller faire un tour sur le site Web de Momentum avant le spectacle, pour surfer joyeusement dans les hyperliens.