Catherine Tardif : Tous azimuts
Avec Le Show poche, le FTA nous invite à une nouvelle plongée dans l’univers loufoque et hilarant de Catherine Tardif. Un collage qui réunit trois danseurs et deux comédiens.
S’il est une chose qu’on peut recommander à quiconque s’apprête à voir un spectacle de Catherine Tardif, c’est de ne pas se fier à son titre et de ne pas présupposer un quelconque message. Rythmées comme une série de courts métrages sans grand lien apparent, ses pièces présentent des personnages et des situations absurdes qui suscitent l’étonnement, parfois, la réflexion et, bien souvent, le rire. Et bien qu’elle soit minutieusement organisée, la matière reste brute.
"Rien n’est déterminé à l’avance, et c’est presque à notre corps défendant qu’on se présente souvent avec un objet hirsute, un peu déchiré et toujours assez drôle, commente la chorégraphe. Cette couleur-là semble déterminée par notre façon de travailler, qui est très libre, très spontanée et qui génère ce type d’énergie et de matériel. Ça crée toujours une explosion, comme le pétillement d’une pastille dans un verre d’eau qui ne s’arrête pas. Et moi, j’ai juste à aller piger dans cette matière qui n’arrête pas de foisonner."
Depuis Le Show western, Tardif construit ses oeuvres en partant d’improvisations tous azimuts avec ses interprètes, des amis de longue date qui ne s’embarrassent pas de faux-semblants pour entrer dans le processus de création. C’est dans leur intimité profonde et dans leurs expériences de vie qu’ils puisent la matière de la cinquantaine de saynètes qui composent chaque pièce. "J’aime leur capacité de faire confiance à tout dans le processus de création et de s’abandonner au plaisir et à la joie au point parfois d’être un peu honteux de certaines petites audaces, confie la chorégraphe. Parce qu’ils ont conscience qu’ils font une chose qui en cache beaucoup d’autres et qui les révèle en transparence… Ce n’est pas toujours évident de ne pas se laisser aller au cabotinage dans ce contexte, et j’apprécie aussi l’intelligence de ces interprètes qui savent se retenir pour ne pas déraper."
Les interprètes, cette fois, ce sont les danseurs Marc Boivin, Guy Trifirio et Sophie Corriveau, accompagnés des comédiens Daniel Parent et Jean Turcotte. L’équipe est complétée par trois autres vieux complices: Michel F. Côté à la direction musicale, Marc Parent aux éclairages et Angelo Barsetti aux costumes et aux maquillages. Cette fois, la pièce est sans décor. Juste emballée de rideaux noirs à l’intérieur desquels les interprètes restent "pris" pendant toute la durée de la représentation.
Même processus que pour les deux pièces précédentes, même plaisir fou à les créer et, on peut le prédire sans se tromper, même difficulté pour les critiques à mettre des mots sur une oeuvre qui glisse comme un poisson entre les mains. Et s’il n’y aura aucun doute sur la signature, l’expérience du spectateur ne peut être que renouvelée. "Les pièces sont très différentes les unes des autres parce que justement, elles naissent de toutes sortes de spontanéités, lance Tardif. Chaque fois, je me retrouve dans quelque chose à découvrir et il faut que je m’y abandonne plus que d’essayer d’exercer un contrôle." Une sage attitude que le spectateur sera bien avisé d’adopter.