Le Nid : À l’épreuve du feu
Avec Le Nid, Félix Beaulieu-Duchesneau et Sandrine Cloutier nous offrent une fable ornithologique d’une remarquable inventivité, un grand moment de théâtre sur la minuscule scène de La Petite Licorne.
Dans la vie, il y a différentes façons de réagir face à l’adversité. Certains s’effondrent, d’autres rebondissent. Félix Beaulieu-Duchesneau et Sandrine Cloutier, eux, créent. C’est ainsi que, des cendres de leur appartement, est né Le Nid, une histoire d’amour, de perte et de renaissance qu’ils interprètent après l’avoir écrite et mise en scène.
Après un incendie, deux ornithologues, Phoénix et Cassandre, fouillent dans leur passé carbonisé et y retrouvent des souvenirs. Sur fond de cris d’oiseaux, ils se rappellent leur rencontre, le nid qu’ils s’étaient construit, l’ambition qui les a dévorés, et les plumes qu’ils ont perdues en cours de route. L’amour peut-il renaître de ses cendres, comme ce phénix qui obsède l’ornithologue éponyme?
Évitant les écueils du moralisme et de la banalité, les deux créateurs prennent la parole sous la forme d’une charmante fable tragicomique. Si la mise en perspective des histoires d’hommes et de volatiles est intéressante, ce qui séduit surtout dans ce spectacle, c’est sa forme, empruntant à diverses techniques théâtrales: clown, théâtre d’objets, marionnettes, théâtre d’ombres… Dans les mains de Beaulieu-Duchesneau et de Cloutier – qui ont à l’évidence mis à profit les conseils de Jacques Laroche, spécialiste de la marionnette et du jeu clownesque -, un cartable chevauche une lampe et se transforme en corneille, une main noircie devient tête d’oiseau, un gant de cuisine, corneille en fuite. Voilà deux artistes dont l’imagination semble n’avoir aucune limite. Et quel talent! Ils savent même imiter les cris d’oiseaux, c’est dire.
Quand ce ne sont pas leurs onomatopées, c’est la trame sonore de Benoît Côté qui nous fait voyager de la maison calcinée au parc ornithologique où Cassandre multiplie les sauvetages et où Phoénix cherche des preuves. La scénographie de Josée Bergeron-Proulx est tout à fait ingénieuse, exploitant l’espace scénique exigu avec une rare intelligence. Quant à la mise en scène, elle est d’un dynamisme incroyable, efficacement soutenue par les éclairages d’Erwann Bernard. Le Théâtre Qui va là s’est donné pour mission de surprendre le spectateur et de le convaincre que la magie existe encore. Ça marche, et on en redemande!