Wajdi Mouawad : Soleil méditerranéen
Scène

Wajdi Mouawad : Soleil méditerranéen

Wajdi Mouawad présente sa pièce épique Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face en formule lecture-spectacle, accompagné du joueur d’oud Mel M’rabet.

La pièce Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face de Wajdi Mouawad devait initialement être présentée du 26 au 30 mai dans une production du Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine. Or, à la suite du désistement d’un de ses trois acteurs clés, la compagnie a dû se résoudre à annuler la tournée nord-américaine.

Absorbé par les répétitions de Ciels, quatrième chapitre de sa tétralogie Le Sang des promesses, ainsi que par la production des trois premiers volets mis bout à bout en prévision du Festival d’Avignon – dont il est l’artiste associé 2009 -, le directeur artistique a tout de même trouvé l’occasion de faire "entendre le parfum" de ce texte au public ottavien.

Finaliste au Prix littéraire du Gouverneur général, Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face est le fruit d’une commande du metteur en scène Dominique Pitoiset, qui désirait se pencher sur les textes de grands auteurs grecs qui abordaient la ville de Thèbes. "Il voulait faire un montage des pièces de Sophocle, d’Euripide, d’Eschyle, se souvient Wajdi Mouawad. J’avais essayé pour vite me rendre compte que ça ne tenait pas la route. Ce n’est pas du tout le même type d’écriture, le même rapport aux dieux…" Du coup, l’auteur raconte à son comparse les origines de Thèbes et, ensemble, ils choisissent cette nouvelle avenue.

Privilégiant l’histoire de trois personnages d’une même lignée familiale (Cadmos, Laïos, OEdipe), Wajdi Mouawad reconstitue l’histoire épique des fondateurs de Thèbes. "Cadmos, qui a fondé la ville de Thèbes, est l’arrière-arrière-arrière-grand-père d’OEdipe. La pièce se divise en trois parties entrecoupées d’importants sauts dans le temps. Cadmos marche, Laïos court et OEdipe boite", illustre-t-il pour marquer les thèmes de chaque séquence.

Ainsi, suite à l’annulation du spectacle qui lui aurait permis de voir la mise en scène de Pitoiset, Wajdi Mouawad a fait volte-face et présentera de "très larges extraits" de la pièce, appuyé par un Mel M’rabet à l’instrument millénaire. "La vie a fait en sorte que j’ai rencontré ce grand oudiste qui vit à Ottawa. Je lui ai dit qu’on allait faire la chose à deux: il joue de la musique, je lis des extraits. C’est un excellent improvisateur qui fait dans le jazz, la musique du monde."

Malgré son emploi du temps chargé, l’auteur-metteur en scène se dit ravi de retrouver l’état qui l’animait à l’écriture de cette pièce, qui s’avère un formidable travail préparatoire pour son adaptation des sept tragédies de Sophocle prévue pour 2011-2012.

Si Wajdi Mouawad nous a habitués à des titres plus concis récemment, il renoue ici avec un titre éloquent, emprunté à une maxime de La Rochefoucauld, et qui n’est pas sans rappeler ce soleil aveuglant qui causa la mort dans L’Étranger de Camus. "Inconsciemment, probablement que Camus a été présent lors de l’écriture. Il fait partie de la constellation que je regarde le soir quand je me couche. Il est une des étoiles que je regarde. En fait, la présence de la Méditerranée est une constellation en soi. Ce fameux soleil de la Méditerranée; celui de Camus, de Sophocle, de Cadmos… Celui de M’rabet le musicien aussi, qui est Marocain d’origine…"

À propos du titre, il renchérit: "C’est un très beau titre. On ne peut pas regarder le soleil, c’est impossible. Idem pour la mort. Ce titre traduit tout le mystère de la vie. Les histoires racontées là-dedans sont vraiment liées au mystère de notre présence sur Terre", conclut-il.