Antonio Najarro : Le flamenco métissé
Après avoir tenu l’affiche du Festival de jazz pendant deux semaines avec Tango Flamenco, Antonio Najarro y revient avec Jazzing Flamenco. Une fusion inattendue qui réunit 12 danseurs et six musiciens et qui devrait se jouer à guichets fermés.
Quand il commence à danser le flamenco dans les ferias du sud de l’Espagne, Antonio Najarro pressent d’emblée qu’il doit aller plus loin. À huit ans, il entre au Conservatoire royal de danse de Madrid. À 15 ans, il débute une brillante carrière de danseur professionnel. Cinq ans plus tard, on remarque ses chorégraphies et, à 33 ans, il remporte le titre de meilleur chorégraphe d’Espagne pour Jazzing Flamenco. Du ballet classique aux techniques contemporaines en passant par les danses folkloriques et la escuela bolera (danse classique en chaussons incluant l’usage des castagnettes), il a été formé à tous les styles, incluant la danse classique espagnole qu’il valorise et modernise depuis 2002 au sein de sa propre compagnie.
"C’est un flamenco avec des castagnettes et une grande base de ballet classique dans la technique, explique le chorégraphe-interprète. Son histoire est récente et peu de compagnies l’abordent parce que c’est très difficile: il faut une bonne maîtrise des castagnettes et avoir la coordination pour en jouer avec les zapateados et les tours. Ma compagnie est la seule qui la montre sur scène."
À l’heure où les chorégraphes contemporains de la péninsule ibérique revisitent leur patrimoine, Najarro en modernise la danse classique en y incluant une gestuelle contemporaine et en la mariant avec des musiques en rupture avec la tradition. Après avoir réussi le métissage avec le tango puis avec les musiques orientales, le voilà qui s’attaque au jazz, au blues et au soul. Comme pour chacune de ses deux précédentes créations, il a travaillé en amont avec le compositeur Fernando Egozcue pour définir la qualité et les atmosphères des musiques des 11 tableaux qui composent le spectacle.
"On a fait une véritable incursion dans l’histoire de ces musiques pour parvenir à une vraie fusion avec beaucoup de respect, assure celui qui chorégraphie aussi pour des champions de patinage artistique. On a étudié les grands thèmes comme Rhapsody in Blue et les rythmes comme le ragtime et on a créé une nouvelle composition à partir de là. Aussi, on a regardé comment s’habillaient ces artistes et ça m’a servi de base pour dessiner les costumes avec une vision novatrice en lien avec la mode actuelle."
Ensuite, Najarro a conçu en solo les pas et les grandes lignes des chorégraphies qu’il a montées en studio avec les 11 danseurs qui l’accompagnent sur scène. Pour se sortir de sa zone de confort et ainsi "créer un plus", il a invité le chorégraphe et ami Ruben Olmo à créer certains de ses solos. Il a fallu en tout cinq mois pour peaufiner cette courtepointe de numéros qui portent chacun leur caractère, leur histoire et cherchent à procurer une expérience visuelle, sonore et émotionnelle à la fois. Une formule qui semble rallier un très large public et qui devrait aussi bien séduire les mélomanes que les fans de flamenco.