Jean-François F. Lessard : Drame musical
Jean-François F. Lessard a exploré, avec son band théâtral, le métissage entre musique et art dramatique dès les débuts de la création. Résultat: Mono Lake.
Ayant comme origine un projet de maîtrise dont l’objectif était de créer une dramaturgie particulière en alliant musique et théâtre à l’intérieur du processus créatif, Mono Lake se présente désormais comme une oeuvre achevée, où ces deux formes se retrouvent intimement liées. "Le bassiste partait une run, et là, un comédien lançait un texte, puis le guitariste embarquait et un autre comédien venait jouer avec le premier, raconte Jean-François F. Lessard, metteur en scène et musicien initiateur du projet, à propos de leurs séances d’improvisation. Ça a créé des moments où tu ne peux enlever ni la musique ni le texte."
En fait, l’expérience a même dépassé ses attentes. "Ce qui m’impressionne encore dans ce mariage, c’est l’influence que ça a eue sur la construction de l’oeuvre. Le passage du jeu réaliste au jeu non réaliste, que ce soit construit comme un casse-tête, qu’il y ait des scènes qui se répètent, des mouvements, des codas, des zones de dissonance, c’est la musique qui amène ça, observe-t-il. Je n’avais pas présupposé que ça se pouvait à ce point." De plus, la musique, qu’il qualifie de "post-rock, avec une touche indie et un relent de progressif", a également inspiré la mise en scène, alors que le décor évoque, outre le Mono Lake, un stage rock, alors que les éclairages s’apparentent à ceux d’un show du même genre.
Inversement, la musique se trouve elle-même abordée de façon théâtrale, et non seulement du fait qu’elle raconte une histoire. "Les musiciens sur scène deviennent une espèce de choeur. C’est comme si la musique était le sous-texte et eux, l’alter ego des personnages. En plus, la musique amène une sensation des lieux." Par rapport aux premières ébauches présentées en 2008 à l’Université Laval, le spectacle va encore plus loin sur le plan sonore. "Il y a de petits haut-parleurs partout au-dessus du public, ce qui fait que le son se promène, poursuit-il. Je vois la salle comme une immense boîte crânienne, un prolongement de ce qu’il y a dans la tête des personnages."
À leur sujet, il explique: "La puissance de la musique, l’invitation à l’intériorité qu’elle amène nous a conduits à créer des personnages assez profonds, tourmentés. Et, en les faisant interagir, toujours en lien avec elle, il s’est créé une histoire." Entre le présent, où un homme et une femme se croisent au Mono Lake, et le passé, où s’enracine la raison de leur présence en ce lieu, les pièces du puzzle se mettent graduellement en place pour nous permettre de découvrir leur mystère. Ce faisant, il est question d’amour, de disparition, de solitude, de la difficulté à entrer en contact avec l’autre. "Les réactions par rapport à Mono Lake sont les plus émotives, les plus vibrantes que j’ai vécues pour un spectacle", confie le metteur en scène, en précisant que si l’expérience paraît peu banale, elle n’a cependant rien d’hermétique.