Catherine Lalonde : Amours et dépendances
Scène

Catherine Lalonde : Amours et dépendances

Catherine Lalonde marie la poésie, la danse et le théâtre dans Musica Nocturna, La nuit sera longue, une oeuvre qui met en scène un couple entre peur et désir.

Elle a été interprète pour divers chorégraphes, elle écrit sur la danse dans Le Devoir, touche à la performance, au spoken word, et elle est aussi, et peut-être même avant tout, poète. Auteure d’un premier recueil de poèmes à 16 ans et récipiendaire du prix Émile-Nelligan 2008, voilà Catherine Lalonde invitée par la compagnie Danse-Cité à porter à la scène le texte Musica Nocturna. Monté en version courte en 2007, ce monologue plutôt bavard d’un homme s’adressant à une femme traite de la déchirure d’un couple englué dans la dépendance affective. Il est incarné par le comédien Jean-François Casabonne et par la danseuse et chorégraphe Geneviève La.

"Depuis 2007, j’ai été chamboulée par la lecture du Journal de la création de Nancy Huston qui examine plusieurs couples d’écrivains et dégage la vision que l’homme est associé au texte et à l’intelligence, et la femme, au corps et peut-être à l’oralité, raconte Lalonde. Et je me suis rendu compte que c’était exactement ce que j’avais mis en scène. Alors là, on a fait plein d’exercices et de recherches pour donner la parole à Geneviève."

Créer des ponts entre le verbe et le corps, ouvrir les sentiers qui relient la pensée et l’émotion. Le défi de la mise en espace et en mouvement de la poésie est d’autant plus grand que ce genre littéraire peut s’avérer aussi insaisissable que la danse. "Ce que je trouve intéressant, c’est que parfois, en superposant l’abstraction de la danse contemporaine et celle de la poésie, surgit un troisième sens qui devient évident contre toute attente, s’étonne la créatrice. D’autres fois, tu es simplement bombardé par les différentes strates, il y a trop d’informations et, comme spectateur, tu es obligé de te laisser aller et de juste regarder le flot."

Regarder le flot, se laisser porter par le rythme des mots, suivre le flux de la voix et être en résonance avec l’impulsion des corps en mouvement. Car l’acteur bouge aussi, simplement, tandis que la danseuse y va d’une gestuelle nerveuse, vive et détaillée, co-créée sur les mots avec Lalonde, complice et amie de longue date avec laquelle elle a fondé la compagnie À La2 Danse etc.

Le questionnement sur les liens entre danse et écriture se prolonge dans la scénographie d’Anick La Bissonnière, constituée de grandes laies de papier, d’un lit fait de ballons de papier recyclé et de centaines de livres disséminés sur le sol. "On est encore dans ce rapport au temps où la danse est censée être éphémère et la littérature, plus immuable, et je me trouve avec 6000 livres destinés au pilon et je réalise que le texte n’est plus immuable parce qu’on est rentré dans un marché de livre, commente Lalonde. Comme auteure, je le prends en pleine face: j’aurais pu tomber sur un de mes livres dans ces boîtes… Cette réflexion-là est dans la scénographie et dans le rapport assez destructeur qu’ont les interprètes avec le livre."