Alex Perron : Mâle dominant
Scène

Alex Perron : Mâle dominant

Pour son premier one man show, Un gars c’t’un gars, Alex Perron explore les zones troubles de la masculinité et la tyrannie du quotidien sur le ton de la confidence. Bluff ou sincérité? Il nous en parle.

Est-ce un spectacle autobiographique dans lequel l’humoriste s’épanchera sur son statut bien connu d’homosexuel à la féminité exacerbée? C’est la question qu’on se pose inévitablement en voyant l’affiche d’Un gars c’t’un gars. Alex Perron s’y est glissé dans le costume viril d’un joueur de hockey, affichant un air de vainqueur et arborant fièrement ses gros gants rose bonbon de hockeyeur pas comme les autres. "J’ai bâti ma carrière là-dessus, alors oui, il sera encore question de mon homosexualité, répond-il un brin agacé par la question. C’est ma carte de visite, que je vais toujours nuancer, retravailler, faire aller dans de nouvelles directions. Cela dit, ça ne m’intéresse pas de raconter mes déboires homosexuels pendant tout un show. J’ai hésité, par exemple, avant de décider de raconter comment j’ai dit à ma mère que j’étais gai. Mais je suis forcé d’admettre que c’est l’un des gros morceaux du spectacle, qui fonctionne parce que je le fais avec beaucoup d’autodérision et que j’essaie de jouer sur la frontière entre la réalité et la fiction. J’aime cultiver l’ambiguïté, que les gens se demandent ce qui est vrai et ce qui est faux."

Les choses sont donc claires. Perron ne vient pas sur scène pour "faire une thérapie à la Janette Bertrand". Ni pour revendiquer les droits des homosexuels, que d’ailleurs il ne représente pas dans leur entièreté. "Mon personnage de grande folle, qui est le vrai reflet de moi-même, il irrite d’ailleurs plusieurs homosexuels." Sur un ton moqueur et légèrement baveux, il veut plutôt explorer l’idée que la masculinité en prend pour son rhume à notre drôle d’époque. "Je m’amuse à reprocher aux hétéros de s’être approprié notre mode, de se raser et de sentir bon. Dans le numéro d’ouverture, je me moque des métrosexuels. Je te jure, chaque soir, j’en trouve un dans la salle. Il se lève avec fierté devant sa blonde, tout aussi fière, qui manifeste sa satisfaction. Ça m’amuse énormément."

À l’écouter, tout était bien moins compliqué dans les années 80, sa décennie fétiche, à laquelle il consacre un long monologue dans le spectacle, et dont l’esthétique a peut-être influencé le décor "glamour" que sa metteure en scène Chantal Lamarre l’a convaincu d’adopter. Il avait aussi envie de parler de tout et de rien, de sa haine des moralisateurs et des faiseurs de conscience, par exemple, comme ces diététistes qui lui disent quand et quoi manger. Il aime quand ses blagues touchent des cordes sensibles et "créent des petits malaises". Sans qu’ils ne soient hyper-corrosifs, il croit que certains de ses propos "pourraient choquer certaines oreilles".

Mais, dit-il, il y a de la place pour un peu de retenue dans son spectacle. C’est grâce à son directeur artistique Pierre Bernard, homme de théâtre qui l’a "poussé dans des zones où [il] ne serait pas nécessairement allé" et incité à diminuer le nombre de blagues à la minute pour laisser respirer le spectacle. Incroyable mais vrai.