Beaucoup de bruit pour rien : Amours florissantes
Scène

Beaucoup de bruit pour rien : Amours florissantes

Pour faire entrer Beaucoup de bruit pour rien au répertoire du Théâtre du Nouveau Monde, René Richard Cyr a signé un spectacle tout simplement irrésistible.

La pièce, que le metteur en scène a eu la bonne idée de délester de quelques personnages et intrigues secondaires, est d’une légèreté que l’on associe plus volontiers à Molière, Goldoni ou Marivaux. Shakespeare nous a pourtant laissé de savoureuses comédies, des chassés-croisés amoureux qui prennent parfois, mais bien sûr seulement de manière momentanée, une tournure tragique. Beaucoup de bruit pour rien est du nombre.

Pour sa dixième mise en scène entre les murs du TNM, René Richard Cyr a choisi de faire entrer au répertoire de la prestigieuse institution, pourtant portée sur le théâtre du grand Will, un texte qui n’y avait jamais été monté. Un vrai bon coup! Soyons clair, la pièce est sans conséquence aucune, mais elle est d’une telle drôlerie, truffée d’esprit et de bons mots, sans parler des comédiens de haut vol dont la production bénéficie, que l’expérience en devient carrément jouissive. Autrement dit, il faudrait être bien amer ou alors très cynique pour résister à pareil divertissement.

Adoptant le jeu et l’humour propres aux dessins animés, mais toujours avec beaucoup de doigté et d’ironie, la représentation est dotée d’un charme irrésistible. Le mélange d’orgueil et d’intelligence qui caractérise les deux personnages principaux est explosif. "Toi et moi, nous avons trop d’esprit pour nous aimer tranquillement", lance Bénédict à Béatrice, résumant ainsi la dynamique qui les unit. Faut-il vous dire que leurs prises de bec sont hautes en couleur?

Macha Limonchik est une Béatrice adorable, bien loin de la fameuse mégère apprivoisée. On comprend très tôt qu’elle est bien plus tendre et romantique qu’elle ne le laisse paraître. Même chose pour le Bénédict incarné par David Savard. Sous une carapace de misogynie, le jeune homme cache une midinette, un amoureux passionné, une vraie Candy Neige. À vrai dire, les pitreries de Savard sont si drôles qu’elles valent à elles seules le déplacement.

Les 12 personnages qui s’agitent autour du couple central ne manquent pas de panache non plus. Au fil d’une intrigue dont le caractère improbable est une qualité, Maxim Gaudette, Sophie Desmarais, Véronic Rodrigue, Milène Leclerc et Robert Lalonde, mais surtout Vincent-Guillaume Otis, truculent dans le rôle du vilain Juan, en mettent plein la vue. Il faut dire aussi la beauté du décor de Pierre-Étienne Locas et des éclairages de Martin Labrecque. Le verger qu’ils ont imaginé est à la fois enchanteur et inquiétant, naturel et artificiel, une vraie splendeur.

À voir si vous aimez /
Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux
La Mégère apprivoisée et Roméo et Juliette de Shakespeare
Beauty and the Beast et Aladdin de Disney