Catatonie : Le CRI sourd
Dix ans plus tard, voilà que le Théâtre CRI présente pour une seconde fois Catatonie. Nouvelle mouture.
Lorsque l’on connaît le synopsis de Catatonie, il est plutôt déroutant de s’entretenir avec Émilie Gilbert-Gagnon, celle qui interprétera le rôle de Grâce Castonguay. À l’opposé total de son personnage inquiétant et sinistre, la comédienne est pétillante et tout ce qu’il y a de plus expressif. Du contre-emploi à son paroxysme, donc.
Catatonie relate l’histoire d’une femme souffrant de solitude qui décide d’enlever des personnes catatoniques complètement inertes afin de meubler sa vie. Avec cette pièce, le Théâtre CRI ne s’en cache pas: il y a un certain désir de l’exporter un peu partout dans le monde. Gilbert-Gagnon nous explique: "Pour amener un show en tournée, il faut que tout soit pensé en conséquence. Que ce soit le décor, le nombre de comédiens, de techniciens, tout ça est à considérer. Des fois, ça peut sembler un peu contraignant, mais en réalité, ça nous pousse plus souvent à user d’ingéniosité. Pour Catatonie, Guylaine Rivard [la metteure en scène] avait comme but de faire voyager la pièce. Elle a donc fait son possible pour réduire l’équipe et l’aspect technique afin que l’exportation se fasse le plus facilement possible."
Le personnage de Grâce Castonguay sera donc entouré de trois complices avec qui l’interactivité sera plutôt corsée. Gilbert-Gagnon nous fait part du tour de force scénique auquel les autres comédiens devront se livrer: "Dans la pièce, les êtres catatoniques sont complètement inertes, mais chacun a une petite particularité. Guylaine leur a tous donné une personnalité qui est très subtile. Ça peut sembler bizarre, mais ça demande beaucoup de concentration à un acteur pour jouer ça."
Naturellement, on devine que partager la scène avec une telle équipe doit comporter quelques difficultés. "Peut-être que pour un autre comédien, ce serait moins pire, mais pour moi, c’est un grand défi. En plus d’être mon premier rôle professionnel depuis que je suis sortie de l’école, ce n’est vraiment pas un rôle facile. Je suis avec trois comédiens super, mais ils ne peuvent aucunement m’aider. On ne se redonne pas d’énergie, il n’y a pas de transfert comme au théâtre plus traditionnel."
Enfin, bien que le sujet de Catatonie soit sombre et étrange, on serait en droit de penser que cette pièce ne s’adresse qu’à une certaine élite. Toutefois, la comédienne se fait très rassurante: "Le public va se sentir un peu voyeur. Les gens vont avoir l’impression d’être dans l’appartement d’une femme qui a un sérieux trouble, où elle amène trois corps qu’elle a kidnappés. Il y a donc quelque chose qui rend mal à l’aise, mais en même temps, on est curieux de savoir ce qu’elle va en faire et quelles sont ses motivations. Et même s’il n’y a pas beaucoup de dialogues, c’est vraiment une histoire avec un début, un milieu et une fin."
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